Économie. Triple A : Sarkozy pourrait tout perdre
Il en avait fait sa priorité. Pas question de perdre la note ‘AAA‘ sous sa présidence. Pourtant, après les menaces de rétrogradation de l’agence Standard & Poor’s (S&P), le chef de l’État va devoir serrer la ceinture. À cinq mois de l’élection présidentielle, ça pourrait être un coup fatal.
« On fait tout pour conserver notre »Triple A » ». La déclaration de François Fillon hier mardi sur le plateau du journal de France 2 résume bien l’état d’esprit du gouvernement.
Lundi, après un mini-sommet franco-allemand, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy s’étaient mis d’accord pour imposer à l’Europe une plus grande rigueur budgétaire. Des annonces qui devaient mettre la France à l’abri d’une dégradation de sa note.
Mais au même moment, pas convaincue par le duo franco-allemand, l’agence de notation américaine annonçait le placement de 15 des 17 membres de la zone euro sous « surveillance négative ».
Si les six pays bénéficiant de la note maximale ont été menacés, seule la France risque de perdre deux crans. Une décision justifiée selon l’agence de notation américaine.
En cause, la situation des banques françaises (plus grandes détentrices en Europe de dettes souveraines de pays européens), la faible prévision de croissance pour 2012 et les possibles répercussions sur son économie des « problèmes politiques, financiers et monétaires au sein de la zone euro ».
Sarkozy dos au mur
« Il ne peut pas se permettre une dégradation », avait lancé l’économiste Alain Minc il y a quelques semaines avant d’enfoncer le clou : « Nicolas Sarkozy est accroché au ‘AAA’ de la France de manière totale, il joue sa peau d’une certaine façon ».
Hier, François Fillon a nié l’existence d’un nouveau plan de rigueur pour 2012. Pourtant, le président est maintenant dos au mur. Les deux derniers plans de rigueur, en août et novembre dernier n’ont pas suffi.
À quelques mois d’une élection présidentielle qui sent la poudre, le président Sarkozy ne peut pas se permettre de perdre le triple A. Candidat, il en avait fait son cheval de bataille et avait promis aux Français qu’il conserverait la note de la France.
Face à la faible prévision de croissance pour 2012 et au chômage qui ne cesse pas de grimper, le président va abattre sa dernière carte. S’il venait à perdre la note souveraine, il n’aurait plus de marge de manœuvre face aux Français.
Mais un nouveau plan de rigueur juste avant les élections pourrait lui être fatal. Hier, Henri Guaino, conseiller spécial du président, affirmait qu’il n’y aurait pas d’autres mesures d’austérité « dans l’immédiat ».
Hollande joue la prudence
« Tout est fait pour protéger les Français, les économies des Français, et elles seront protégées », assurait lundi soir le ministre de l’Economie François Baroin.
Depuis, de l’eau est passée sous les ponts et la dégradation de la note française dans les 3 mois ne fait plus guère de doute.
À gauche, en coulisse, on se frotte les mains. Mais pas question d’en faire trop. Invité hier de France Inter, François Hollande a rappelé « ne pas souhaiter une dégradation de la note de la France » et en a profité pour souligner « l’échec de la politique conduite depuis cinq ans ».
Un travail d’équilibriste entre critiques et optimisme. Car en plein crise, le candidat du PS doit apparaître aux yeux des électeurs comme une alternative crédible au président. « Je ne veux rien dire qui puisse affaiblir la France au moment où elle affronte des difficultés », a-t-il lancé l’air grave.
Critiquer Sarkozy sur la (probable) baisse de la note française sera un excellent argument de campagne. Mais François Hollande devra aussi s’ériger en capitaine d’un navire qui traverse une crise sans précèdent. Bousculé par ses alliés de toujours, le candidat PS va d’abord devoir s’affirmer dans son propre camp s’il veut réussir à s’imposer comme l’homme de la situation.
Jonathan Ardines