Algérie – Les islamistes d’El Islah soldent leurs comptes à coups de poignard
Une guerre fratricide s’est déclarée chez les islamistes d’El Islah. La nuit du dimanche 16 octobre, le conflit ouvert entre les deux clans qui se disputaient le contrôle de ce parti créé par Abdellah Djabellah avant d’en être dépossédé, a complètement dégénéré en bataille rangée qui s’est soldée par plusieurs blessés dans les deux camps.
Le siège national de ce parti, dans le quartier de Belouizdad à Alger, a été le théâtre de ce « grand djihad » entre les frères ennemis qui n’ont pas hésité à faire usage de bâtons… et de poignards.
Le tout nouveau secrétaire général de ce parti, Miloud Kadri, s’en est sorti avec de graves blessures et 10 jours d’incapacité de travail. Sans détours, il accuse le secrétaire général sortant, Hamlaoui Akouchi, et le candidat à l’élection présidentielle d’avril 2009, Djahid Younsi, d’être les auteurs de cette agression qu’il a qualifiée de tentative d’assassinat. « Younsi est entré de force au siège du parti à la tête d’un groupe constitué de 40 baltaguia, armés de couteaux et de sabres. Il m’a porté cinq coups de couteaux à la cuisse », confie-t-il au journal arabophone El Khabar. Il n’a dû son salut qu’à l’intervention des citoyens du quartier de Belouizdad qui l’ont tiré des griffes de ses agresseurs. Une plainte aurait été déposée.
Djahid Younsi, lui, nie en bloc toutes ces accusations portées contre lui préférant parler plutôt d’ « une simple bousculade » entre les deux parties adverses, dont lui-même s’en est sorti avec quelques égratignures à la main. « Est-il possible qu’un Docteur à l’Université prenne un couteau ? », s’est-il défendu sur les colonnes du journal arabophone Echourouk, avant de faire le reproche au groupe de Kadri de vouloir faire main basse sur le parti.
En effet, l’assemblée générale du parti, tenue samedi matin, a décidé de mettre fin au règne du président du parti, Rabah Youcef, et de son secrétaire général, Hamaloui Akouchi, et de les remplacer respectivement par Abdeslam Kessal et Miloud Kadri.
Le jour même, un dossier a été déposé au niveau du ministère de l’intérieur pour officialiser ces changements. N’ayant pas digéré ce « coup de force », Hamlaoui Akouchi et son groupe ont décidé le lendemain de se faire justice en investissant de force le siège du parti non sans régler leurs comptes – et de quelle manière ! – avec leurs adversaires.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, ce dérapage n’a pas donné lieu à un tollé. Il est vrai que les islamistes n’ont pas l’exclusivité du recours aux ‘’baltaguias’’ pour solder des différends politiques. Des voyous ont été mobilisés en hiver dernier pour chahuter les manifestations de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) qui revendiquait le changement de système politique en Algérie.
Il y a aussi le précédent du FLN quand, en 2003, au plus fort du conflit entre les partisans des candidats Bouteflika et Benflis à la présidentielle de 2004, un groupe de militants, à leur tête Abdelhamid Si Affif (l’actuel président de la commission juridique de l’Assemblée nationale), a attaqué une mouhafadha de Mostaganem à l’aide de… chiens dobermans.
Yacine Ouchikh