Algérie. Le soutien intéressé de L’UE au gouvernement algérien
Quelque 120 observateurs européens vont encadrer les élections législatives de 10 mai. La décision a été officialisée hier mardi à Alger avec la signature d’un mémorandum d’entente sur la mission d’observation européenne du prochain scrutin entre le ministre algérien des Affaires étrangères Mourad Medelci et le commissaire européen à l’Élargissement et à la Politique de voisinage, Stefan Füle, en visite depuis lundi à Alger. (Photo AFP)
Aux yeux du responsable européen, les prochaines législatives sont « particulièrement importantes », car elles sont « les premières à être organisées après l’annonce d’importantes réformes démocratiques qui vont changer les conditions dans lesquelles la démocratie s’exerce ».
L’importance de cet accord réside, estime Stefan Füle, dans le fait que « pour la première fois, nous établissons les conditions dans lesquelles l’UE va envoyer sa première mission d’observateurs électoraux pour les élections parlementaires ».
A son arrivée lundi à Alger, M. Füle a déjà donné le ton. « La mission d’observation européenne sollicitée par l’Algérie à l’occasion des élections législatives du 10 mai, est un nouveau signe de confiance dans nos relations », a-t-il expliqué lors d’une conférence conjointe animée avec le ministre algérien des Affaires étrangères. « La mission est en cours de préparation », a-t-il précisé.
Mieux, M. Füle a tenu à exprimer son soutien aux réformes lancées par le président Bouteflika : « Depuis ma dernière visite au mois de mai de l’année dernière, l’Algérie a entrepris des réformes très importantes qui reflètent la volonté de changer les réalités pour la population algérienne », a-t-il soutenu dans une déclaration reprise par l’agence officielle APS.
« Nous nous rendons compte, bien évidemment, que ces réformes ne sont pas toujours faciles, mais elles sont essentielles pour l’Algérie et nous sommes là pour vous soutenir dans la mise en œuvre de ces réformes qui visent à répondre aux aspirations légitimes du peuple algérien ». Mieux, M. Füle estime que la mise en œuvre de ces réformes « est très importante pour le renforcement de la démocratie et des libertés en Algérie».
Une transaction commerciale ?
A la recherche de soutien dans une conjoncture régionale qui lui est défavorable mais aussi d’une onction internationale à une élection capitale pour sa survie, le régime de Bouteflika n’en demanderait pas tant.
Question : l’UE a-t-elle engagé sa crédibilité sans contrepartie ? D’aucuns accusent l’Espagne et l’Italie, en difficulté économique, d’avoir quelque peu forcé la main aux autres membres de l’UE pour envoyer des observateurs en Algérie.
D’autres parlent d’une vente concomitante entre les deux parties : en contrepartie de l’envoi d’une mission d’observation, l’UE aurait obtenu des autorités algériennes l’accélération de la signature à des conditions avantageuses d’un accord sur l’énergie.
« L’Union européenne sait que le pouvoir algérien est fragilisé par le printemps arabe et les demandes de changement exprimées dans presque tous le pays à travers des mouvements de protestation. Elle semble avoir saisi cette occasion pour obtenir l’accélération de la signature d’un accord énergétique dont on ignore les contours mais qui ne peut qu’être bénéfique pour la partie européenne », a écrit le site électronique TSA.
Le ministère des Affaires étrangères a certes réfuté « de la manière la plus catégorique » tout lien entre l’envoi des observateurs et l’accélération de la signature de l’accord sur l’énergie. Mais les faits sont là : deux jours avant son arrivée à Alger, Stefan Füle a publié une tribune dans deux quotidiens algériens pour exprimer son attente, à savoir la signature rapide de cet accord sur l’énergie.
Lundi, lors de leur conférence conjointe, la réponse de Mourad Medelci est on ne peut plus claire : la conclusion des accords sur l’énergie et le report du démantèlement tarifaire sont une question de semaines. « Après avoir évalué le taux d’avancement extrêmement important sur ces négociations, nous sommes convenus de faire le maximum d’efforts pour que ces deux accords puissent être signés dans les prochaines semaines », a-t-il promis.
Yacine Ouchikh