Algérie. Le pied de nez de Aïcha Kadhafi aux autorités algériennes
Aïcha Kadhafi récidive ! La fille unique de l’ancien maître de Tripoli, en exil « humanitaire » à Alger depuis fin août, a passé outre l’interdiction de s’exprimer publiquement qui lui a été signifiée, septembre dernier, par le ministre algérien des affaires étrangères Mourad Medelci.
Profitant du 40ème jour de la mort de son père, Aïcha Kadhafi a de nouveau parlé à la chaîne de télévision syrienne Erraï. Mieux, elle s’est laissée aller à une harangue en appelant les Libyens à un soulèvement contre les nouvelles autorités pour venger l’ancien dictateur qualifié de « martyr », tué en octobre dernier après sa capture par des rebelles du CNT.
« Mouammar Kadhafi le martyr ne vous a jamais déçus et ne vous a jamais laissé tomber. Il vous a promis et il a tenu sa promesse. Il vous a donné les martyrs au courage de lions Mouatassim BiAllah, Khamis, Seïf El Arab et le moudjahid (combattant) Seïf El Islam. En plus de cela, il a sacrifié sa vie pour la terre de ses ancêtres et il a défendu jusqu’à son dernier souffle son pays et son peuple », a-t-elle soutenu dans un enregistrement sonore diffusé par la chaîne satellitaire syrienne.
«Vengez votre martyr, soulevez-vous contre la mascarade du nouveau gouvernement qui est venu à bord d’un avion de l’Otan et s’est établi sur les crânes des martyrs », s’est-elle exclamée.
Cette fois-ci encore, les membres du CNT n’ont pas été épargnés en se voyant qualifier de « traîtres ». « Quant à vous, traîtres, il viendra le jour où vous paierez très cher », a-t-elle averti.
En septembre dernier, Aïcha Kadhafi s’est exprimée sur Erraï, toujours en traitant les combattants du CNT de « traîtres », tout en appelant les pro-Kadhafi à continuer le combat.
Cette sortie publique avait suscité la colère des autorités algériennes qui s’apprêtaient alors à normaliser leurs relations avec les nouveaux dirigeants de la Libye. Aïcha Kadhafi a été brutalement remise à l’ordre par Mourad Medelci qui a qualifié ses propos d’« inacceptables ».
« Je tiens à dire que cette sortie (médiatique de Aïcha Kadhafi, ndlr) est inacceptable pour nous et que des décisions seront prises pour, qu’à l’avenir, des comportements de ce type-là ne puissent plus avoir lieu», avait-il répliqué fermement.
Les dessous d’une sortie médiatique
Deux mois après, bis repetita. Pour le moment, aucune réaction officielle alors que la présente sortie publique de la fille de Kadhafi a tout d’un défi à l’égard des autorités algérienne qui ne finissent pas de manger leur pain noir depuis le déclenchement des révoltes arabes.
Une sortie qui appelle aussi bien des questions : pourquoi Aïcha Kadhafi a-t-elle attendu plus de deux mois pour renouer avec les médias ? A-t-elle agi de son propre chef ? N’a-t-elle pas eu des assurances, du moins des encouragements, de la part de certaines parties et lesquelles ? Difficile d’y répondre.
Ce qu’il faut relever est qu’à la mort du dictateur libyen, l’exilée d’Alger n’avait pas soufflé mot. En outre, sa présente bravade coïncide avec l’activisme diplomatique de Bouteflika qui tente de rabibocher sa relation avec le petit émirat du Qatar ainsi que ses protégés, le CNT et le parti d’Ennahdha tunisien.
Elle intervient aussi au lendemain du remplacement de Nordine Cherouati, l’ex PDG de Sonatrach, un homme des militaires, par Abdelhamid Zerguine, un fidèle de Bouteflika, et qui signe, à bien y regarder, la relance de la guerre Armée – Présidence.
En activant la remuante Aïcha Kadhafi, chercherait-on à saper les efforts de Bouteflika de se rapprocher de Doha et, partant, des islamistes ? Possible.
Yacine Ouchikh