Algérie – La commémoration des événements du 5 octobre 88 réprimée

 Algérie – La commémoration des événements du 5 octobre 88 réprimée

Toute manifestation est réprimée en Algérie. Photo AFP.

L’Algérie a-t-elle tourné le dos au printemps arabe ? Dans un contexte régional révolutionnaire, la commémoration du 23ème anniversaire des événements du 5 octobre 1988 n’a pas, hélas, connu une grande mobilisation.

A peine une vingtaine de jeunes, filles et garçons, se sont agglutinés devant le parvis du théâtre national algérien (TNA) à l’appel du Rassemblement action jeunesse (RAJ), une association proche du Front des forces socialistes (FFS) du vieil opposant en exil Hocine Ait Ahmed. A croire que la belle page d’histoire que viennent d’écrire les jeunes Tunisiens et Egyptiens n’a aucune emprise sur la jeunesse algérienne.

Il n’y a pas eu grand monde hier mercredi sur les lieux où l’on comptait célébrer cette date fondatrice qui a fait entrer l’Algérie dans la pluralité politique et médiatique. Il est vrai que dès 11 heures,  les policiers, en civil et en tenue, étaient déjà là pour procéder à leurs premières arrestations. Cette petite démonstration de force n’a pas eu raison de la volonté du groupe de militants qui a quand même tenu son rassemblement à l’heure prévue : 12 heures 30. Dans la petite foule, il n’y avait pas que des anonymes. Certaines figures connues  étaient aussi de la partie. Ainsi, on pouvait distinguer Azouaou Hadj Hamou (président d’AVO 88), Chawki Amari (chroniqueur d’El Watan et militant du groupe Bezzaff), Hamid Farhi (militant de gauche et du mouvement des Arouchs), Fadila Chitour (réseau wassila)… Intimidés peut-être par la présence des policiers, le groupe de militants s’est contenté de rester en place et de discuter. « On n’est pas capable de tenir un rassemblement dans un pays de 1,5 millions de martyrs, un pays qui a été toujours aux côtés des peuples luttant pour leur indépendance », s’est indigné Tahar Belabbas, porte-parole des chômeurs de Ouargla. « Maintenant qu’on nous interdit de nous rassembler, il ne reste que la kalachnikov, la violence. Il n’y a pas d’autres solutions », s’est époumoné Azouaou Hadj Hamou devant une grappe de policiers en civil occupés à faire un brin de causette.

On annonce alors l’arrestation du président de RAJ Abdelwahab Fersaoui et celle du président de l’association des clients victimes de la banque Khalifa Omar Abed. « Puisqu’on arrête nos militants, allons marcher pour qu’ils nous arrêtent tous », s’est écrié Hamid Farhi sans que personne ne lui prête attention. A un policier qui tentait de rassurer les manifestants quant à la libération proche de leurs camarades, un jeune a rétorqué : « Ce que nous voulons, c’est de savoir pourquoi vous les avez arrêtés. » Dans l’après-midi, tous les militants arrêtés, une dizaine selon les organisateurs de la manifestation, ont été relâchés.

L’action du RAJ n’a donc pas connu un meilleur sort que celles initiées pendant des mois par la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) qui avait vu toutes ses tentatives de marche empêchées et, parfois, réprimées. Le message des autorités algériennes est clair : aucune  manifestation de rue ne sera tolérée.

Yacine Ouchikh