Algérie. Branle-bas suite au rapport de Transparency International

 Algérie. Branle-bas suite au rapport de Transparency International

« Personne n’a nié l’existence des affaires de corruption qui rongent l’économie nationale »

Epinglée par Transparency International dans son dernier rapport sur la corruption qui l’a classée à la peu reluisante 112ème place, l’Algérie contre-attaque pour soigner un tant soit peu son image de marque qui en a pris un sérieux coup.

Pour célébrer la journée mondiale de lutte contre la corruption, le ministère de la Justice a organisé aujourd’hui vendredi une conférence sur ce thème en conviant près de 1 000 personnes dont des représentants de l’ONU et  de l’Union européenne.

Le but de cette rencontre est de monter en épingle les « efforts déployés par l’Algérie en matière de lutte contre ce fléau et la sensibilisation sur ce phénomène avec ses répercussions socioéconomiques et la nécessité de conjuguer les efforts pour faire y face », expliquent les organisateurs.

Un rapport très contesté

Hier jeudi, en répondant aux questions des membres du conseil de la Nation, le ministre de la Justice Tayeb Belaiz a convenu de l’existence de la corruption en Algérie tout rassurant sur l’existence d’une volonté politique chez les autorités pour la combattre.

« Personne n’a nié l’existence des affaires de corruption qui rongent l’économie nationale », a déclaré M. Belaiz. S’il n’a pas jugé utile de jeter la pierre à Transparency International, ce n’est pas le cas de son directeur des affaires pénales, Mokhtar Lakhdiri qui, sur les ondes de la radio algérienne, a violemment contesté, hier, le contenu du rapport de cette ONG.

« Ce rapport n’est pas désintéressé. Transparency International fait appel à des hommes d’affaires, à des agences de risque économique. Il y a cet arrière plan économique qui cache des enjeux stratégiques. Transparency ne s’intéresse qu’à la demande de corruption. Elle occulte l’offre de corruption. On sait, dans le commerce international, qui est corrupteur et qui est corrompu. Les paramètres de Transparency occultent aussi des phénomènes répandus dans les pays en transition économique comme l’évasion fiscale et le transfert illicite de fonds à l’étranger », dénonce-t-il.

Il a également ajouté : « Si nous avons été épinglés par le rapport de Transparency International, ce n’est pas à cause du manque de performance de l’institution judiciaire ou des services en charge de la lutte contre la corruption. C’est beaucoup plus une suspicion de corruption. Transparency se base sur des paramètres économiques et sur le cadre général qui régit le monde des affaires et l’environnement économique ».

Ce branle-bas de combat ne s’est pas limité au seul ministère de la Justice. La présidence de la République s’est, elle aussi, impliquée dans cette riposte qui ne dit pas son nom à Transparency International.

Un office de répression de la corruption

Le président Bouteflika a signé, hier encore, un décret présidentiel portant composition, organisation et modalités de fonctionnement de l’Office central de répression de la corruption (OCRC).

Cette initiative est présentée par un communiqué de la présidence de la République comme une volonté de renforcer les instruments de lutte contre les différentes formes d’atteinte à la richesse économique de la nation.

Cet office est chargé d’effectuer sous la direction du Parquet, des recherches et des enquêtes en matière d’infractions liées à la corruption. Pour mener à bien sa mission, il est mis à sa disposition des officiers de police judiciaire dont la compétence s’étend à tout le territoire national en matière d’infractions qui leur sont connexes.

Précision de taille, cet office est administrativement rattaché au ministère des Finances et non pas au DRS qui a l’habitude de mener ce genre d’enquêtes. C’est ce service qui a été à l’origine des scandales qui ont éclaboussé la Sonatrach et le projet de l’autoroute est-ouest.

Reste à vérifier l’efficacité de toutes ces initiatives. En 2006, une loi relative à la prévention et à la lutte contre la corruption a été promulguée, s’inspirant de la convention des Nations Unies contre la corruption, adoptée en 2003. Le phénomène est-il depuis jugulé ? Non.

Yacine Ouchikh