Mort de Zineb Redouane : le CRS incriminé échappe aux sanctions administratives
Contrairement à l’avis de l’IGPN, la police nationale ne sanctionnera pas le CRS responsable de la mort de Zineb Redouane. La femme de 80 ans est morte après avoir été touchée par un tir de gaz lacrymogène au visage, alors qu’elle se trouvait dans son appartement.
Le CRS mis en cause dans l’affaire Zineb Redouane échappe au conseil de discipline et donc aux sanctions administratives. Frédéric Veaux a ainsi décidé de ne pas suivre l’avis de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), rapporte l’AFP. Celle-ci préconisait, dans les conclusions de son enquête administrative, un renvoi devant le conseil de discipline.
Lire aussi >> Société. Violences policières : « 1 million de voix » interpellent Macron
Le 2 décembre 2018, la vieille femme fermait sa fenêtre pendant une manifestation de gilets jaunes dans les rues de Marseille lorsqu’un projectile l’atteint en plein visage. Elle décédera à l’hôpital 24 heures plus tard. Dans son rapport, l’IGPN a estimé que le CRS avait bien réalisé un tir réglementaire sans viser délibérément la victime. Mais, il avait manqué à « l’obligation de discernement par une action manifestement inadaptée », selon une source proche du dossier. Le lance-grenades du CRS avait une portée de 100 mètres tandis que l’immeuble de Zineb Redouane se situait à une trentaine de mètres.
Le DGPN met en avant la fatigue et le manque de visibilité
Le DGPN a motivé sa décision d’absoudre le policier par la « fatigue », le « manque de visibilité », la « tension » et « la nécessité légalement établie de tirer ». Autant d’arguments qu’il a puisés dans le rapport IGPN. Il estime donc pouvoir dispenser le CRS d’une sanction disciplinaire.
Le policier qui supervisait le CRS au moment du tir, pour lequel l’IGPN recommandait aussi un passage en conseil de discipline, y échappe également. Les deux fonctionnaires, « très bien notés » selon une source relayée par les médias. Ils devront simplement suivre « un stage » pour se faire « rappeler les consignes en vigueur sur l’emploi des moyens de défense ».
Bataille d’experts
« Ça ne m’étonne pas, nous n’attendions rien de la hiérarchie policière. Le plus important c’est que le CRS comparaisse devant une cour d’assises pour meurtre », a réagi auprès l’avocat de la famille de Zineb Redouane, Me Yassine Bouzrou. L’enquête administrative a été versée à l’information judiciaire, dépaysée à Lyon et toujours en cours.
La justice n’a mentionné aucune éventuelle mise en examen jusqu’à présent. Un rapport d’expertise de mai 2020 avait conclu que le tir policier avait été effectué dans les règles – en cloche – et avait atteint la victime accidentellement. Une contre-expertise, indépendante menée par le média d’investigation en ligne Disclose et le groupe de recherche basé à Londres Forensic Architecture, avait été publiée fin 2020. Elle concluait au contraire à un tir tendu, pratique interdite face à un immeuble d’habitation. L’organisation a ainsi réalisé une reconstitution vidéo (lien en anglais) à partir des éléments de l’enquête.