Fin des files d’attente « invisibles » en préfectures ?
La dématérialisation n'est pas une obligation dans les préfectures. Cette décision du Conseil d'Etat devrait avoir un réel impact sur l'application des droits des étrangers.
Pas obligatoire
La décision du Conseil d'Etat du 27 novembre rappelle « que les dispositions réglementaires ne permettent pas de rendre obligatoire l’accomplissement des démarches administratives par voie électronique ». C'est ce qu'indiquent, soulagés, La Cimade, le Gisti, la Ligue des droits de l’Homme et le Syndicat des avocats de France. Ainsi, par cette décision, la haute juridiction rend possible une action en justice contre les préfectures qui rendraient obligatoires la prise de rendez-vous par internet afin, notamment, d'obtenir ou de renouveler un titre de séjour.
Option
C'est donc une longue attente qui vient de prendre fin pour La Cimade, le Gisti, la Ligue des droits de l’Homme et le Syndicat des avocats de France. Ces quatre organisations avaient saisi le Conseil d'Etat en 2018 « suite au refus du Premier ministre de modifier le décret du 27 mai 2016 autorisant la mise en œuvre des téléservices ». La modification concernait la spécification du caractère facultatif de l'usage des téléservices. Les organisations dénonçaient le fait que certaine préfectures rendaient l'utilisation des téléservices obligatoires pour obtenir un titre de séjour ou la nationalité française : « Cette obligation est à l’origine de blocages graves dans l’accès aux droits, d’une part parce que certaines personnes ne sont pas en capacité d’utiliser les téléservices, d’autre part parce qu’il est devenu de plus en plus fréquent qu’aucun rendez-vous ne soit proposé en ligne ».
Responsabilités
Le 7 octobre, à l'Assemblée nationale, Edouard Philippe estimait que la « dématérialisation des procédures […] aidera à remédier [aux files d’attentes nocturnes] ». Sauf que dans les faits cette dématérialisation est devenue l'outil d'un véritable obstacle à l'exécution d'obligations administratives. Si le Conseil d'Etat n'a décidé une modification du décret du 27 mai 2016, il a rappelé que ce dernier « ne saurait avoir légalement pour effet de rendre obligatoire la saisine de l’administration par voie électronique ». De plus, la haute juridiction indique que ce sont les « décisions rendant obligatoires de telles prises de rendez-vous [pour les démarches administratives, ndlr] », prises par certains préfets, qui compliquent la tâche des ressortissants étrangers notamment.
Une décision qui va permettre aux organisations de défense des droits des étrangers de « demander à l’ensemble des préfectures organisant la dématérialisation obligatoire des rendez-vous de leur communiquer leurs décisions et à engager des contentieux contre ces décisions expresses ou implicites ». Et ainsi, l’exécution des démarches administratives ne sera plus entravée par la dématérialisation. Une première bataille de gagner par les organisations.