Un navire affrété par l’extrême droite en route pour la Méditerranée

 Un navire affrété par l’extrême droite en route pour la Méditerranée

Les personnes tentant la traversée vers l’Europe continuent de mourir par dizaines malgré le déploiement de plusieurs bateaux de secours affrétées par des ONG (illustration)


Un navire de 40 mètres, le C-Star, affrété par des militants d’extrême droite, est en route pour la Méditerranée pour lutter contre l’immigration clandestine au large de la Libye, ont annoncé mardi des militants. Cette opération « Defend Europe » (défendons l’Europe) est menée par le réseau européen Génération identitaire (GI) et en particulier ses antennes française, italienne et allemande.


Grâce à une collecte de fonds lancée mi-mai sur internet, et malgré une campagne d’opposition qui a poussé le service de paiement en ligne PayPal à geler leur compte, les militants ont récolté plus de 87 000 dollars (76 000 euros) auprès d’un millier de donateurs. Ces fonds ont permis de louer le C-Star et son équipage, qui sont partis en fin de semaine dernière de Djibouti. Ils doivent franchir jeudi le canal de Suez et embarquer des militants à Catane (Sicile) la semaine prochaine, avant de gagner la zone des secours au large de la Libye.


L’objectif est « de montrer le vrai visage des ONG soi-disant humanitaires, leur collaboration avec les mafias de passeurs, et les conséquences mortelles de leurs actions en mer », explique Clément Galant dans une vidéo diffusée par GI sur les réseaux sociaux. Des accusations qui font écho à celles de l’agence Frontex chargée de la surveillance des frontières européennes. Le procureur de Catane a toutefois déclaré ne pas disposer de preuve à ce sujet. La commission d’enquête de la défense du Sénat italien a également conclu qu’il n’y a aucune collusion entre ONG et organisations de trafiquants, et le premier ministre italien a même remercié les secouristes pour leur aide.


 



Reportage de Thalassa sur les opérations de secours en Méditerranée diffusé en mars 2016


Renvoyer les migrants en Libye pour « sauver l’Europe »


Des conclusions qui ne semblent pas dissuader les militants d’extrême droite. « Lors de notre mission, lorsque nous croiserons des bateaux remplis de clandestins, nous appellerons les gardes-côtes libyens pour qu’ils puissent venir les secourir et nous veillerons à leur sécurité le temps de leur arrivée », ajoute-t-il. L’objectif est donc que les migrants soient reconduits en Libye. Les gardes-côtes italiens considèrent pour leur part que la Libye n’offre pas de « port sûr » au regard du droit maritime et organisent toujours le transfert vers l’Italie des migrants secourus.


« En sauvant des personnes et en faisant obstacle au réseau des trafiquants, nous pouvons sauver l’Europe et sauver des vies en même temps », a expliqué un porte-parole de GI-Italie. Plusieurs ONG engagées dans les opérations de secours en mer ont déjà exprimé leur inquiétude face à l’arrivée de ce bateau, qui s’ajoute aux volontés du gouvernement italien de leur imposer un code de conduite sévère.


En France, un organisme gouvernemental a d’ailleurs signalé l’opération à la justice, dénonçant une « provocation à la discrimination » et un risque de « délit d’entrave » aux secours. Depuis plusieurs années, la Méditerranée détient le triste titre de frontière la plus meurtrière du monde.


Rached Cherif