700 morts dans un naufrage : sans doute la « pire hécatombe jamais vue en Méditerranée »
Le début de la semaine avait déjà été marqué par ce qui s’annonçait comme le naufrage le plus important depuis le début du siècle. Mais ce record macabre est en passe d’être pulvérisé à peine quelques jours plus tard. Selon le Haut-commissariat aux réfugiés, qui rapporte des témoignages de survivants, un chalutier transportant des migrants a chaviré dans la nuit de samedi 18 à dimanche 19 avril, faisant jusqu'à 700 morts.
Plus important naufrage de l’Histoire en Méditerranée
Nouveau drame en Méditerranée : le chavirage d'un chalutier la nuit de samedi 18 à dimanche 19 avril pourrait avoir fait plusieurs centaines de victimes ; plus de 700 morts, redoute le HCR. Si ces chiffres étaient confirmés, il s'agirait de la « pire hécatombe jamais vue en Méditerranée », s'est alarmée l'agence des Nations unies. Environ 20 corps ont déjà été repêchés selon des médias italiens. Le nombre de morts depuis début 2015 s’élèverait à plus de 1600 morts, contre moins de 50 durant la même période en 2014.
Vingt-huit personnes ont été repêchées après le naufrage, qui a eu lieu au large des côtes libyennes, à environ 120 milles nautiques au sud de l'île italienne de Lampedusa, rapporte Times of Malta. L'alerte a été lancée vers minuit, selon un porte-parole de la marine maltaise. Le bateau aurait chaviré lorsque les migrants selon les témoignages des survivants se sont massés du même côté à l'approche d'un navire marchand, un cargo portugais dont l’équipage a assisté au drame.
Réduction des moyens européens de sauvetage en Méditerranée
Une importante opération de secours a été mise en place avec le concours des marines italienne et maltaise, a fait savoir un porte-parole de la marine maltaise. Mais, compte tenu du nombre de disparus, cette catastrophe s’annonce bien pire que celle survenue au début de la semaine ou que celle qui, en octobre 2013, avait provoqué une vague d’émotion telle que plusieurs pays européens avaient décidé le lancement de l’opération Mare Nostrum. En un an, la mission a permis de secourir plus de 150 000 personnes, soit plus de 400 par jour en moyenne, et d'arrêter 351 passeurs.
Faute de budget, l’opération principalement portée par une Italie en crise économique a été remplacée par « Triton », une opération de surveillance des frontières beaucoup plus modeste. Dans ce nouveau cadre, les navires engagés se contentent de patrouiller le long des cotes italiennes et maltaises, alors qu’une majorité des naufrages survient près des côtes africaines, peu après le départ des embarcations de migrants fuyant la guerre, la dictature et la misère dans leurs pays.
Des morts comme barrière à l’immigration
Plusieurs organisations internationales et humanitaires ont d’ailleurs dénoncé ces derniers jours l'incurie des autorités européennes, réclamant davantage de moyens. « Il faut une opération “Mare nostrum” européenne », a réclamé Carlotta Sami, la porte-parole du HCR. Un vœu pieux dans un contexte de crise économique et surtout de montée des extrêmes droites xénophobes qui voient les opérations de sauvetage comme une incitation aux futurs migrants.
Sur Canal+, le président français, François Hollande, a accusé dimanche les passeurs d’être des « terroristes », parce qu’ils savent que « ces bateaux sont pourris ». Il appelle à la tenue d’un conseil des ministres de l'Intérieur européens et des affaires étrangères pour « renforcer les bateaux, plus de survols des zones, et une lutte contre les trafiquants ».
Un renforcement des moyens de Frontex en somme. La controversée agence de surveillance des frontières extérieures de l’Europe est pourtant régulièrement dénoncée pour son manque de transparence et ses atteintes aux droits humains, notamment au sein de la campagne Frontexit, qui regroupe 21 organisations de défense des droits de l’Homme des deux rives de la Méditerranée.
Rached Cherif