Massacres du 17 octobre 1961 : un rassemblement ce jeudi au Pont Saint-Michel à Paris
Soixante-trois ans après les massacres du 17 octobre 1961, plusieurs associations de défense des droits humains, des syndicats et des partis politiques de gauche appellent à un rassemblement ce jeudi à 18 h, devant le Pont Saint-Michel à Paris.
Le 17 octobre 1961, à quelques mois de la fin de la guerre d’Algérie, 30 000 Algériens, souvent en famille, défilent pacifiquement dans les rues de la capitale à la nuit tombée. Ils revendiquent l’égalité des droits, l’indépendance de l’Algérie et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Ils protestent contre le couvre-feu instauré le 3 octobre 1961 par Maurice Papon, alors préfet de police, qui visait exclusivement les « Français musulmans d’Algérie ».
Ce soir-là, des centaines d’Algériens sont tués, notamment près du pont de Bezons. Les jours suivants, des milliers d’autres seront arrêtés, emprisonnés, torturés et, pour certains, refoulés vers l’Algérie.
Cet épisode sombre de l’histoire de France a longtemps été occulté. Ce n’est qu’à partir des années 1980 que les témoignages ont commencé à émerger, notamment grâce aux descendants des Algériens restés en France.
Cependant, une véritable avancée vers la reconnaissance de ces événements s’est produite en 1991, avec la publication par l’historien Jean-Luc Einaudi de son livre La Bataille de Paris, 17 octobre 1961, aux éditions du Seuil.
Sur le plan politique, il faudra attendre 2001, lors du quarantième anniversaire du massacre, pour que Bertrand Delanoë, alors maire de Paris, inaugure une plaque commémorative sur le Pont Saint-Michel.
Cette plaque rend hommage aux « nombreux Algériens tués lors de la sanglante répression de la manifestation pacifique du 17 octobre 1961 ». Aucun membre du gouvernement de Lionel Jospin, alors Premier ministre, ne participera à cet événement.
En 2012, François Hollande, fraîchement élu président, fait un premier pas en reconnaissant dans un communiqué que « des Algériens qui manifestaient pour le droit à l’indépendance ont été tués lors d’une sanglante répression ».
Il ajoute que « la République reconnaît ces faits avec lucidité » et rend hommage à la mémoire des victimes. Cependant, l’absence d’un discours officiel lors d’une cérémonie commémorative limite la portée de cette reconnaissance.
Un autre jalon est franchi le 16 octobre 2021, lorsque Emmanuel Macron devient le premier président français à se rendre sur les lieux du massacre, au pont de Bezons, près de Nanterre. Il y observe une minute de silence et dépose une gerbe de fleurs en mémoire des milliers de victimes. Le lendemain, pour la première fois, un préfet de police de Paris dépose à son tour une gerbe sur le Pont Saint-Michel en hommage aux morts du 17 octobre 1961.
Aujourd’hui, 63 ans après ces massacres, les associations de défense des droits humains demandent que l’État français reconnaisse ces événements comme un « crime d’État ». Elles plaident pour une mémoire collective débarrassée des discriminations et des vestiges d’un passé colonial marqué par de profondes inégalités.
Ces associations réclament également un accès libre aux archives, permettant ainsi aux historiens de travailler sur ces faits, ainsi que la création d’un musée dédié à l’histoire du colonialisme pour favoriser la transmission historique et mémorielle.