La bijouterie arabe et berbère s’expose à l’Institut du Monde Arabe
Parure de tête berbère, fibule de Grande Kabylie, collier tunisien… Issus de la collection d'un couple de passionnés, quelque 250 bijoux du Maghreb s'exposent à partir du 12 février à l'Institut du Monde arabe, révélant la diversité des savoir-faire locaux.
Une collection débutée presque par hasard
« Ces bijoux que les femmes portaient étaient leur richesse, leur assurance-vie, et leur carte d'identité », souligne Jean-François Bouvier, urbaniste à la retraite qui a commencé sa collection avec sa femme à l'occasion de voyages au Maghreb il y a une trentaine d'années. Le couple Bouvier a commencé sa collection en achetant une fibule dans un souk à Marrakech. Leur dernière acquisition en date est un collier en argent doré, venant « probablement de Djerba », déniché au marché aux puces de Vanves.
L'exposition de ces bijoux et parures, datant du XIXe et du début du XXe siècle, commence avec les techniques utilisées : gravure et ajourage, filigrane, granulation, ciselure, moulage. Elle suit ensuite un parcours géographique dans les régions du Maroc, d'Algérie et de Tunisie.
« En Kabylie, on utilise l'émail avec les trois couleurs jaune, bleu et vert. Si on va au Maroc, on a autour de Tiznit (sud) des bijoux pour lesquels on utilise cet émail différemment, ce sera davantage l'ambre ou le corail pour constituer des perles de colliers », commente la commissaire de l'exposition, Djamila Chakour. « Si on remonte plus au nord dans le Maroc, dans les régions autour du Rif, on travaille davantage le métal en lui-même, l'argent massif », décrit-elle.
Une mine d’informations sur les sociétés magrébines
« Du coup à travers un bijou, on arrive à identifier une région, et donc la tribu, les femmes qui pouvaient porter ces bijoux », souligne Djamila Chakour. « Ces femmes sont soit berbères, soit arabes, soit juives, pour certaines, puisqu'on a des pièces qui datent de la période où il y avait des populations juives dans ces pays ».
Beaucoup de parures étaient acquises par le futur mari pour sa femme à l'occasion du mariage, et portées ensuite lors de fêtes, notamment religieuses. Outre leur aspect ornemental, certains bijoux avaient une fonction utilitaire, comme les fibules servant à maintenir le vêtement quand il n'était pas cousu. D'autres sont ornés de motifs à valeur symbolique ou protectrice, comme celui de la main (« khamsa »), ou peuvent contenir des versets du Coran.
Le bijou renseignait aussi sur le statut social de la femme qui le portait. La plupart des pièces de cette collection sont des bijoux berbères, issus des zones rurales ou montagneuses, en argent. Les bijoux citadins étaient essentiellement en or.
Rached Cherif