« Il nous reste les mots »: dialogue entre le père d’un terroriste et celui d’une victime du Bataclan
Lola et Samy avaient tous les deux 28 ans quand ils ont perdu la vie, le 13 novembre 2015, dans la salle de concert du Bataclan, à Paris. La première est morte sous les balles du commando terroriste auquel appartenait le second. Ce dernier a été abattu par un policier.
Cela aurait pu en rester là. Il y a 3 ans, Azdyne Amimour, le père de Samy contacte Georges Salines, le père de Lola. Ensemble, ils vont écrire un livre poignant et courageux. "Il nous reste les mots" qui vient de sortir aux éditions Robert Laffont ne livre pas de réponses, mais ose poser de bonnes questions.
"Quand j’ai reçu le message d’Azdyne il y a trois ans, je n’ai pas hésité à venir le rencontrer. Pour moi ce père est aussi une victime", insiste Georges Salines. Pour lui, "les terroristes, victimes de leurs folies poursuivaient une chimère".
"Je ne peux pas pardonner le geste de mon fils. Un geste que je ne comprends toujours pas", lâche, ému, Azdyne Amimour qui avoue ressentir un sentiment de culpabilité.
Dans ce livre, les papas parlent beaucoup de leurs enfants, les souvenirs s’entremêlent. Lola était une jeune aventurière. Éditrice de livres pour enfants et jeunes adultes, passionnée par son métier, elle consacrait son temps libre à ses amis, à la pratique du roller, aux voyages, au dessin et à la musique. Ce soir-là, elle était venue assister au concert des Eagles of Death Metal.
Née à Tarbes, elle a grandi en Martinique, puis en Egypte, avant que sa famille ne s’installe à Paris, ville qu’elle aimait par‑dessus tout.
Après avoir entamé une licence de droit à l’université, Samy Amimour s’est radicalisé petit à petit, jusqu’à disparaître en Syrie du jour au lendemain. Revenu en France sans être inquiété, il participe à la prise d’otages du Bataclan qui a coûté la vie à quatre-vingt-dix personnes, dont Lola Salines. Il meurt abattu sur la scène par un commissaire de police, à l’âge de vingt-huit ans.
Trois jours après les faits, le domicile familial est perquisitionné et Azdyne Amimour apprendra du procureur lui‑même que son fils faisait partie du commando tueur de la salle de concerts.
"Il nous reste les mots" doit être lu. Comme les papas le disent, ce livre, leur expérience à tous les deux, est "une extraordinaire opportunité de montrer qu’il est possible de se parler d’abattre les murs de méfiance, d’incompréhension, et parfois de haine, qui divisent nos sociétés".