Washington bloque une résolution sur le bombardement d’un camp de migrants
Le Conseil de sécurité de l’ONU n’a pas réussi à adopter mercredi une résolution condamnant le bombardement meurtrier d’un camp de détention de migrants en Libye. Selon des diplomates, Washington a empêché l’adoption d’un texte proposé par Londres.
Réuni en urgence à la demande du Pérou qui en assure la présidence, le Conseil de sécurité s’est penché sur une proposition de résolution britannique portant sur le bombardement mardi d’un camp de détention de migrants près de Tripoli, qui a fait 44 morts. Le projet de résolution appelait également à un cessez-le-feu et au retour à un processus politique pour mettre fin aux combats.
Le texte a finalement été rejeté au terme de plus de deux heures de réunion en raison du blocage des États-Unis. Aucune explication n’a pu être obtenue dans l’immédiat auprès de la mission américaine. Selon une source diplomatique européenne, aucune instruction n’est venue de Washington pour un feu vert définitif à la publication de la déclaration.
Sans accuser une partie ou une autre, le projet de texte reprenait l’ensemble de ces éléments et soulignait aussi la profonde préoccupation du Conseil devant l’aggravation de la situation humanitaire en Libye, tout en réclamant des États membres de l’ONU un plein respect de l’embargo sur les armes décrété en 2011.
Car, malgré cet embargo, la course à l’armement se poursuit entre les deux autorités rivales du pays. Les puissances étrangères sont accusées de violer les résolutions du Conseil de sécurité. En début de réunion, un responsable de l’ONU avait exhorté le Conseil de sécurité à adopter une « position forte pour la paix et la fin de la violence », à défaut de quoi le bilan des victimes civiles continuerait à s’accroître en Libye, a rapporté une source onusienne.
Ce n’est pas la première fois que le Conseil se révèle dans l’incapacité de prendre une position commune depuis l’offensive début avril du maréchal Khalifa Haftar pour conquérir Tripoli, où siège le Gouvernement d’union nationale (GNA) de Fayez al-Sarraj.
Selon des diplomates, « les États-Unis ne veulent pas de résolution » qui critiquerait l’offensive du maréchal Haftar. En avril, l’émissaire de l’ONU pour la Libye, Ghassan Salamé, avait vivement dénoncé l’incapacité de la communauté internationale à adopter une position commune sur la Libye. Le maréchal Haftar est notamment soutenu par l’Égypte et les Émirats arabes unis tandis que le GNA bénéficie de l’appui de la Turquie et est reconnu par la communauté internationale.
En 2019, plus de 3 000 réfugiés et migrants interceptés en mer ont été reconduits en Libye alors que personne ne peut affirmer qu’il s’agit d’un « pays sûr » pour leur sécurité, a par ailleurs fait valoir aux membres du Conseil de sécurité un responsable de l’ONU, en critiquant implicitement ces retours forcés. D’après l’ONU, les centres de détention libyens comptent 5 700 réfugiés et migrants, dont 3 800 sont en position de vulnérabilité face aux combats qui font rage, en particulier à Tripoli et dans les alentours.
(Avec AFP)