Le camp Haftar est-il en passe de prendre le dessus ?
Après une relative accalmie entre belligérants libyens, les forces du maréchal Haftar ont multiplié ces dernières 48 heures des offensives qui apparaissent comme autant de succès militaires stratégiques. Forte d’une certaine supériorité aérienne, l’ANL a ainsi notamment procédé à des frappes à moins de 50 km des frontières tunisiennes.
Les forces gouvernementales se montrent rassurantes en mettant en avant dans leurs médias leurs propres contre-offensives
L'aviation de l'Armée nationale libyenne (ANL), la puissante milice de Khalifa Haftar basée dans l'est du pays, a annoncé lundi avoir bombardé l'aéroport international de Mitiga à Tripoli, la capitale, ainsi que celui de Misrata, occasionnant d’importants dégâts dans ces positions tenues par les forces du gouvernement loyaliste reconnu par l'ONU. « Nos avions de chasse ont mené plusieurs frappes aériennes sur des positions des forces gouvernementales », affirme le service de presse de l'ANL dans un communiqué.
Des frappes qui ont notamment détruit des drones stationnés sur l'aéroport de Misrata, situé à environ 200 km à l'est de Tripoli, ainsi qu'une salle d'opérations située à l'aéroport international de Mitiga, précise la même source, qui ajoute par ailleurs avoir tué 15 soldats des forces gouvernementales dans le sud de Tripoli. Un bilan qui reste néanmoins à vérifier, étant donnée la guerre psychologique qui accompagne l’offensive lancée pour rappel depuis début avril 2019, pour prendre le contrôle de Tripoli et renverser le gouvernement de Fayez Sarraj.
Les forces gouvernementales reconnues par l'ONU ont quant à elles affirmé avoir détruit plusieurs véhicules militaires et capturé 7 soldats de l'ANL, dans le sud de la capitale libyenne.
Un raid dangereusement proche de la frontière tunisienne
Un épisode en particulier, survenu ce même weekend, inquiète le nouveau pouvoir en Tunisie. Le porte-parole de l’ANL de Khallifa Haftar, Ahmed Mesmari, a en effet annoncé que ses forces aériennes ont mené un raid contre le camp « Chahoub », dans la région située entre Ragdaline et Zalten, soit à moins de 50 km des checkpoints tuniso-libyens.
Mesmari a ainsi indiqué que le raid a visé un convoi des milices armées, et qu’il aurait réussi à détruire « 12 véhicules et deux chars appartenant à ces milices ».
Comme s’il avait anticipé cette recrudescence du chaos qui règne en Libye, le nouveau président de la République tunisien Kais Saïed a contre toute attente nommé fin octobre Tarek Bettaieb comme chef de son cabinet, un fin connaisseur du dossier libyen, qui fut de tous les voyages en Libye en compagnie de l’ancien ministre Khemaies Jinhaoui.
En pointe dans une nouvelle initiative de paix en Libye, l’Allemagne a envoyé son émissaire le ministre Heiko Mass en tournée dans la région au cours de laquelle il a rencontré Saïed dès le 28 octobre dernier.
Khalifa Haftar reste donc à ce titre fidèle à ses méthodes d’escalade militaire la veille de grand rendez-vous internationaux de négociations sur la Libye, selon une politique du fait accompli.
Perspicace, ce général issu de l’armée de l’air a démontré qu’il a en outre la patience d’une guerre de longue haleine, aux allures de guérilla urbaine plus récemment à Tripoli, faisant des milliers de morts et de blessés et entraînant le déplacement de centaines de milliers de civils. Une situation humanitaire et migratoire qui préoccupe de plus en plus les chancelleries européennes.