Les comédiens racisés discriminés dans leur carrière

Illustration (scène de Tartuffe, une pièce de Molière). Niklas HALLE’N / AFP
Exclusion de grands rôles, opacité lors des auditions et difficultés à constituer un réseau. Une étude fait état du racisme vécu par les acteurs issus des minorités.
Pour décrire leurs parcours professionnels, plus de la moitié des acteurs et actrices interrogés emploient les termes « discrimination » ou « racisme ». C’est ce qui ressort d’une étude intitulée « La couleur des rôles » réalisée par les universités Sorbonne Paris Nord et Paris 8.
En 2022-2023, des chercheurs en sciences de l’information et de la communication ont mené des entretiens auprès de 100 personnes, dont 51 comédiennes et comédiens perçus comme « non-blancs », c’est-à-dire comme noir, arabe ou asiatique, issus du théâtre et/ou du cinéma et de l’audiovisuel.
Les auteurs de l’étude ont également entendu 24 responsables de distribution artistique et 25 metteurs en scène.
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Color-blind ou color-conscious
Cette étude rappelle que les arts du spectacle bénéficient d’une dérogation à la législation anti-discrimination: il est possible, dans ce secteur, d’utiliser des catégories ethniques ou raciales pour classer les personnes et pour les sélectionner en vue des castings, par exemple.
Dans le théâtre, pour les comédiens sondés, il est difficile d’accéder aux rôles de répertoire et aux grands rôles du patrimoine classique français, comme Marivaux, Racine, etc…
Un débat sur la signification de la couleur de peau sur scène traverse le théâtre, relèvent les auteurs. Deux positions s’affrontent: une « color-blind », qui consiste à faire fi de la couleur de l’épiderme, et une « color-conscious », selon laquelle il s’agit d’un élément à part entière de la dramaturgie.
Cache-misère
Autre constat: dans le théâtre subventionné, les auditions sont rarement annoncées publiquement, empêchant ces comédiens racisés d’y participer et de se constituer un réseau.
Ces dix dernières années, des metteurs en scène ont pu ouvrir davantage leur recrutement. Un « cache-misère », peut-on lire dans l’étude, pour ne pas être taxé de racisme.