L’ancien président mauritanien comparait pour « enrichissement illicite » à Nouakchott

 L’ancien président mauritanien comparait pour « enrichissement illicite » à Nouakchott

Aux côtés de Mohamed Ould Abdel Aziz, ils sont 10 anciens Premiers ministres, ministres et hommes d’affaires accusés d' »enrichissement illicite »

Le procès de Mohamed Ould Abdel Aziz, l’ancien président de la Mauritanie, s’est ouvert mercredi à Nouakchott. Il est poursuivi pour enrichissement illicite. Un procès historique pour celui qui a été à la tête du pays pendant 11 ans.

Soupçonné d’avoir abusé de son pouvoir pour amasser une immense fortune, celui qui a dirigé la Mauritanie de 2008 à 2019 s’est présenté mercredi à l’audience. À l’appel de son nom, Mohamed Ould Abdel Aziz s’est levé au premier rang des dix accusés présents.

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Ensemble, ils forment un casting cinq étoiles pour un procès d’un genre rarissime dans cette région du monde. Anciens président, Premiers ministres, ministres et hommes d’affaires, ils répondent pour une durée inconnue d' »enrichissement illicite », d' »abus de fonctions », de « trafic d’influence » ou de « blanchiment ».

 

La chute de l’homme fort de Nouakchott

Mohamed Ould Abdel Aziz, 66 ans, nie les faits et crie au complot destiné à l’écarter de la politique. En boubou blanc et masque, l’ancien homme fort du pays a suivi en silence les efforts interminables du président pour faire cesser la confusion et trouver un espace à la centaine d’avocats présents dans l’immense prétoire.

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Ces atermoiements n’enlèvent rien à l’extraordinaire du moment. « C’est une première dans l’histoire de la Mauritanie, et peut-être même dans celle du monde arabe. Un ancien président s’explique sur son enrichissement », a déclaré à l’AFP l’un des nombreux avocats représentant l’État, Me Brahim Ebetty.

Mohamed Ould Abdel Aziz est l’un des rares ex-chefs d’État à devoir rendre des comptes sur la façon dont il s’est enrichi au pouvoir. Ses pairs jugés par les justices nationales ou internationales le sont surtout pour des crimes de sang.

 

Dénégations

« Tous les gens présents dans le box ont utilisé le nom de l’État, la fonction de l’État, particulièrement Mohamed Ould Abdel Aziz [pour s’enrichir] », a déclaré Me Ebetty. Malgré son caractère historique, il n’y a aucune prise de vue dans la salle d’audience, même pas de téléphones portables. Les autorités ont fait ceinturer l’enceinte par des centaines de policiers, sans que n’apparaisse clairement la menace à prévenir.

Des dizaines de personnes se sont rassemblées devant le Palais avant le procès, les uns pour soutenir Mohamed Ould Abdel Aziz, d’autres pour réclamer sur des pancartes qu’il « [rende] l’argent ». Mohamed Ould Abdel Aziz n’a cessé de nier les faits depuis que l’étau a commencé à se resserrer sur lui en 2019. C’était quelques mois après qu’il eut cédé la place à l’issue d’élections à l’un de ses plus fidèles compagnons, son ancien chef d’état-major Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani. La première transition non imposée par la force dans un pays abonné aux coups d’État depuis l’indépendance.

Mohamed Ould Abdel Aziz a lui-même été porté au pouvoir par un putsch en 2008 puis élu président en 2009 et réélu en 2014. Ce procès est l’aboutissement de sa mise au ban par son successeur. L’un de ses avocats, Me Antoine Vey, s’est alarmé d’une arrestation « arbitraire » et des conditions augurant que son client n’aurait pas droit à un procès équitable. Il indique en outre préparer la saisine d’instances onusiennes.