L’Algérie veut doubler son budget militaire en 2023
L’avant-projet de Loi de finances algérien pour 2023 prévoit une hausse conséquente du budget du ministère de la Défense. Dans le contexte de relations tendues avec son voisin marocain et d’instabilité régionale, l’Algerie entend montrer les muscles, notamment en renforçant sa coopération avec la Russie.
Hasard ou manipulation ? L’avant-projet de Loi de finances pour 2023 a fuité sur les réseaux sociaux et a rapidement été repéré par les médias locaux. Parmi les évolutions majeures, de nombreux commentateurs ont souligné l’importante augmentation du budget militaire de l’Algérie. La Défense devient ainsi le premier poste de dépense, devant les Finances et l’Éducation nationale.
Concrètement, la défense nationale obtient environ 23 milliards de dollars (3 200 milliards de dinars algériens) contre une moyenne de 10 milliards de dollars les années précédentes. Soit 24% du budget total de l’État et 6,5% du PIB. Avec de telles ressources, l’Algérie est le pays africain qui dépense le plus pour ses forces armées. Il se place loin devant le Nigéria ($5,9 Mds), le Maroc ($5,4 Mds) et l’Égypte ($4,3 Mds), selon les dernières données publiées par l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI).
Plus important budget militaire d’Afrique
Cette forte hausse s’inscrit dans un contexte de regain de tension avec le voisin marocain. Le Royaume a d’ailleurs adopté il y a quelques jours son propre projet de loi de finances 2023 avec un budget de la Défense passant de 10,5 à 10,9 milliards de dollars. Rabat s’est en outre récemment doté d’équipements performants tels que des hélicoptères et des avions de combat américains Apache et F16 de dernière génération, des drones, ainsi que des canons français Caesar.
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À l’opposé, Alger préfère faire ses emplettes en Russie. Sur sa liste pourraient ainsi figurer des systèmes de défense antiaérienne S400, qui s’ajouteraient aux S300 déjà en dotation. Des systèmes russes de radars, de brouillage et de guerre électronique pourraient également intéresser Alger.
Lune de miel russo-algérienne
La relation entre les deux pays est d’ailleurs au beau fixe malgré l’invasion de l’Ukraine par la Russie. En témoignent, les manœuvres qui se déroulent actuellement en Méditerranée. Le ministère de la Défense algérien a confirmé, dans un communiqué, la présence de navires militaires russes dans les eaux algériennes.
Un autre exercice, ‘’Bouclier du Désert’’ doit également se tenir en novembre. Il s’agit d’un exercice militaire tactique rassemblant des parachutistes russes et algériens dans la wilaya de Béchar (Sud-Ouest). Une région frontalière du Maroc.
Outre ses mauvaises relations avec son voisin, l’Algérie se trouve au cœur d’une région instable et entend affirmer son rôle de puissance régionale. Elle veut ainsi peser dans le conflit interne en Libye, mais aussi sécuriser son flanc sud. Notamment sa frontière avec le Mali, où le départ des militaires français profite aux groupes jihadistes.
Déficit public abyssal
Les observateurs notent toutefois que le budget qu’annonce Alger indique des autorisations d’engagement et non des décaissements. Ces dépenses peuvent s’échelonner sur plusieurs années, comme c’est généralement le cas pour les programmes d’armements.
L’Algérie a en effet souffert pendant plusieurs années des faibles prix du pétrole et du gaz dont dépend fortement son économie. Il y a donc également un effet de rattrapage, non seulement sur les équipements, mais aussi sur les salaires et les pensions du ministère de la Défense.
Cette hausse conséquente du budget de la défense ne signifie pas toutefois que la somme sera consommée en une année, mais ce montant pourrait être réparti sur plusieurs années, en raison du caractère spécial des dépenses militaires.
Par ailleurs, ce texte affiche un écart abyssal de 5 000 milliards de dinars (plus de $35 Mds). Un montant qui tend à confirmer que les sommes annoncées ne seront probablement pas toutes dépensées sur l’année fiscale 2023.