L’agence Moody’s abaisse la note de la Tunisie à Caa2 –
Le couperet est tombé : l’agence de notation américaine Moody’s a annoncé ce 28 janvier la dégradation de la note souveraine de la Tunisie à long terme, en devises et en monnaie locale, de Caa1 à Caa2, avec perspective négative. Il s’agit de la 10ème dégradation de la note souveraine de la Tunisie depuis 2011. Le pays est désormais classée « pays à risque très élevé ».
Cela ne pouvait pas plus mal tomber pour le pouvoir en place la veille d’un second tour des législatives censé être la consécration du chantier constitutionnel engagé par le président Kais Saïed, accusé par l’opposition de reléguer le dossier économique et social du pays loin derrière les questions de mainmise politique sur le pays.
En sus de la note souveraine, Moody’s a également, abaissé la note de la Banque centrale de Tunisie (BCT), qui pour rappel est légalement responsable des paiements sur toutes les obligations du gouvernement, de Caa1 à Caa2, assortie elle aussi d’une perspective négative.
En octobre 2021, le président Saïed avait qualifié les agences de notation de « ommek sannefa », un jeu de mots moqueur, estimant que « nul ne leur a demandé de noter le pays ». « Une incroyable affirmation qui tend à corroborer le fait que l’homme ne comprend pas le fonctionnement de la finance internationale », selon nombre d’économistes.
Un silence du FMI qui coûte très cher
Selon Moody’s, cette nouvelle dégradation est expliquée par l’incertitude quant à la capacité du gouvernement à mettre en place des mesures qui puissent répondre aux besoins de financement élevés, malgré les demandes pressantes en ce sens du FMI qui avait demandé aux autorités de ne pas attendre le déblocage des prêts pour entamer des réformes significatives. « Si un financement important n’est pas assuré, la Tunisie risque un défaut de paiement de sa dette », averti l’agence. Le terme est lâché : le spectre du défaut de paiement est donc aujourd’hui une réalité.
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Concernant les perspectives négatives, Moody’s estime qu’elles sont « liées aux retards dans la mise en œuvre des réformes et des financements qui en dépendent et qui risquent d’éroder les réserves de change à cause des prélèvements pour le paiement du service de la dette, exacerbant ainsi les risques sur la balance des paiements ».
« Les nouveaux retards prolongés dans la mise en place d’un nouveau programme du FMI éroderaient les réserves de change par le biais de prélèvements pour le paiement du service de la dette, exacerbant ainsi les risques de balance des paiements et la probabilité d’une restructuration de la dette qui entraînerait des pertes pour les créanciers du secteur privé », souligne Moody’s.
Pire, l’agence avait déjà mis en garde que les risques pesant sur le profil de crédit de la Tunisie resteront orientés à la baisse, même dans le cadre d’un éventuel accord avec le FMI.
« Les perspectives de financement restent tributaires de la mise en œuvre rapide et soutenue de réformes qui s’avéreront invariablement difficiles face aux faiblesses de la gouvernance et à l’exposition aiguë aux risques sociaux », d’après l’agence de notation.
La mise en œuvre du programme de réforme du gouvernement, qui offre une voie pour corriger les importants déséquilibres budgétaires et extérieurs du pays, « risque d’être mise à l’épreuve par des obstacles politiques, sociaux et institutionnels », conclut la même source.