La Tunisie et la Russie signent un protocole de coopération en matière électorale
Un mémorandum de coopération a été signé le 15 mars dans la capitale de la Russie, Moscou, entre l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE) et la Commission électorale centrale de la fédération de Russie, à six mois du scrutin présidentiel en Tunisie.
L’ambassade de Russie en Tunisie s’en félicite
Sous d’autres cieux la nouvelle pourrait être le titre d’une plaisanterie ou du sketch d’un humoriste. Le journaliste Jamel Arfaoui a d’ailleurs commenté l’information sur un ton railleur : « La Tunisie et la Russie signent un mémorandum de coopération dans le domaine électoral… Poutine en tant que président de 2000 à 2036… une expérience très inspirante », a-t-il ironisé dans un tweet.
تونس وروسيا تُوقّعان مذكرة تعاون في المجال الانتخابي.
** بوتين في الرئاسة من 2000 حتى العام 2036 .. تجربة ملهمة برشة pic.twitter.com/3J7mp2PHqz— Jamel Arfaoui (@Jamel_Arfaoui) March 15, 2024
Mais il s’agit d’un évènement tout ce qu’il y a de plus sérieux et solennel. Au moment où le président à vie russe, Vladimir Poutine, aux commandes du pays depuis 24 ans, s’apprêtait à être réélu pour un cinquième mandat (sixième si l’on compte l’ancien mandat constitutionnellement acrobatique de Dimitri Medvedev) avec le score très démocratique de 87 % des suffrages, selon de premières estimations, et au moment où le scrutin a été marqué par une forte répression de l’opposition allant jusqu’à l’élimination physique, dans un contexte de guerre contre l’Ukraine, le protocole signé par le président de l’Instance tunisienne, Farouk Bouasker et la présidente de la Commission russe, Ella Pamfilova, en dit long sur la direction que prend la Tunisie de Kais Saïed.
L’accord vise, selon un communiqué de l’ISIE, à « instaurer la coopération entre les deux instances en matière d’utilisation des nouvelles technologies dans les processus électoraux, à favoriser l’échange d’expertises et à organiser des sessions de formation pour les structures chargées de l’organisation des opérations électorales ». Tout un programme ! « « À cette occasion, le président de l’instance a signé en présence de son homologue russe un mémorandum de coopération entre l’ISIE et la Commission électorale centrale de la Fédération de la Russie, notamment en matière de coopération continue dans l’utilisation des moyens modernes dans le cadre des processus, la tenue de formations au profit des organes chargés des volets opérationnels et sur le terrain des différentes étapes des opérations électorales », a précisé l’ISIE.
Il s’agit d’être à bonne école
Le président de l’ISIE effectuait une visite à Moscou à l’invitation de la présidente de la commission électorale russe, qui s’inscrit dans le cadre de la participation à la mission d’observation internationale du scrutin présidentiel russe, qui se tient du vendredi 15 au dimanche 17 mars 2024. Les deux responsables ont souligné l’importance de cette visite, première du genre, qui a été couronnée par la signature du protocole de coopération entre les deux instances, lequel favorisera la mise en place d’une coopération couvrant les domaines de première priorité pour les deux instances.
Dans le cadre de sa participation à la mission d’observation internationale de l’élection présidentielle russe, Bouasker a visité en fin de semaine trois bureaux de vote où il a participé au suivi des opérations de vote qui se sont déroulées selon différentes modalités (vote à l’urne, vote électronique direct, vote à distance…). Il a par ailleurs pris part aux travaux d’une conférence internationale organisée par la Commission électorale centrale russe sur la souveraineté électorale et les normes internationales, en présence d’experts et d’observateurs internationaux.
Ce n’est pas la première fois que les deux pays collaborent en la matière : fin 2022, une mission d’observateurs russes pour les élections législatives tunisiennes avait été exceptionnellement autorisée par le régime tunisien à observer le déroulement du scrutin, au moment où le président Saïed était contre la présence d’observateurs étrangers : « Les étrangers peuvent suivre les élections en tant que simples observateurs, mais ne peuvent venir en Tunisie pour les superviser, car seuls les Tunisiens peuvent superviser le scrutin ».
Dimanche, l’activiste Adnane Belhajamor a déploré le fait que le chef de l’Etat s’adonne à des visites telles que celle effectuée la veille dans le gouvernorat de Kebili, des exercices qui n’ont rien selon lui de la visite de travail et tout de la précampagne électorale en vue de la présidentielle dans 6 mois, au moment où ses plus importants adversaires politiques croupissent en prison.
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