La posidonie : le trésor marin de la Tunisie menacée de disparition
En Tunisie, la posidonie, une herbe marine subit de plein fouet les effets des activités humaines. Pourtant, de nombreux Tunisiens ignorent son rôle clé pour l’économie du pays. Cette algue protège en effet les plages de l’érosion et sert de nurserie à de nombreuses espèces marines.
Les baigneurs considèrent avec dédain cette algue qu’ils jugent disgracieuse lorsqu’elle affleure près des plages. Ils ne se doutent pas que la posidonie joue un rôle crucial pour le tourisme et la pêche. Elles sont aussi un atout de taille dans la lutte contre le dérèglement climatique.
« La Tunisie possède de loin les plus grands herbiers de la Méditerranée », plus d’un million d’hectares, assure à l’AFP Rym Zakhama-Sraieb, chercheuse en écologie marine à Tunis. Ces forêts sous-marines, présentes jusqu’à 50 mètres de profondeur, servent d’abri à de nombreuses espèces de poissons. Les feuilles de « posidonia oceanica » contribuent aussi à casser les vagues et ainsi à préserver le littoral de l’érosion. C’est donc une alliée du secteur touristique (14 % du PIB) et des pêcheurs (150 000 emplois directs).
Grâce à leurs racines rhizomes, les herbiers stockent le carbone et produisent de l’oxygène. Les herbiers, qui absorbent trois fois plus de carbone qu’une forêt, peuvent en fixer de grandes quantités sur des milliers d’années. Cette végétation marine produit en outre 14 à 20 litres d’oxygène par mètre carré.
Un trésor en voie de disparition
Mais, cette algue à tout faire risque de disparaître du littoral tunisien à cause de l’homme. Depuis les années 1970, les usines de traitement chimique des phosphates de la région de Gabès déversent des quantités astronomiques de phosphogypse. Résultat : il reste moins de 40 % d’herbiers de posidonie dans le Golfe de Gabès, pourtant considéré comme l’une des principales zones de reproduction de la faune marine en Méditerranée.
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Sur le reste du littoral, où se concentre 70 % de la population tunisienne, aménagements du littoral, pêche illicite, fermes aquacoles installées sur les herbiers abîment cet écosystème fragile. Or, la posidonie pousse très lentement, moins de cinq centimètres par an.
De plus, même échouées sur la plage, les « banquettes » de posidonie protègent les côtes de la houle. Elles améliorent aussi la qualité de l’eau et sa transparence. Mais, à cause de l’ignorance du grand public et des décideurs, les « banquettes » de posidonie échouées sur les plages sont par exemple souvent considérées comme des déchets. Des bulldozers viennent les évacuer, ôtant au passage beaucoup de sable et accélérant l’érosion, selon les chercheurs. Selon eux, près de la moitié des plages tunisiennes pourraient bientôt disparaître.