La Banque mondiale révise à la baisse ses prévisions de croissance en Tunisie
La Banque mondiale a revu largement à la baisse ce weekend ses prévisions de croissance économique pour la Tunisie, à seulement 1,2% en 2023, contre 2,3%, au mois de juin 2023 en guise de prévisions anticipées à l’époque. L’institution évoque des perspectives « très incertaines ».
Les gouvernements respectifs de Najla Bouden puis de Ahmed Hachani s’en prévalaient depuis cet été, promettant que les sacrifices opérés notamment au niveau de la balance commerciale du pays finiraient par payer, puisque les plus grandes institutions financières de Washington le disent : entre 2,3 et 2.5% de croissance étaient attendus. Or, c’est tout ce raisonnement qui tombe à l’eau maintenant que l’on sait que ces prévisions sont à réduire au moins de moitié, des suites du manque de visibilité politico-économique.
En effet, dans son rapport intitulé « Trouver le juste équilibre : Emplois et salaires en temps de crise dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord » publié en fin de semaine dernière, la Banque mondiale révèle que l’économie tunisienne « semble ralentir de manière significative » par rapport à la tendance de 2022 et même de 2021, année où la pandémie de Covid impactait encore fortement le climat des affaires.
La sécheresse, handicap supplémentaire
Ainsi d’après l’institution financière internationale, cette faible croissance reflète « les conditions difficiles liées à la sécheresse particulièrement pour le secteur agricole, aux incertitudes entourant le financement de la dette, tout comme la faible dynamique des réformes structurelles », dans une économie encore très dépendante des récoltes agricoles, criblée par les pénuries alimentaires, et qui rechigne à réformer les grandes entreprises publiques (Tunisair, STEG, etc.).
Par conséquent, en l’absence d’un accord de financement avec le Fonds Monétaire International (FMI) et de financements extérieurs, situation conjuguée à une conjoncture mondiale incertaine, les finances publiques et le compte extérieur de la Tunisie demeureront « précaires », conclut la Banque.
Cependant le déficit budgétaire devrait quant à lui diminuer à 5,6% du PIB en 2023, contre 6,6 % du PIB en 2022. Une légère embellie qui s’explique essentiellement par la baisse des subventions énergétiques à la pompe, une masse salariale sensiblement moindre, et une augmentation record des recettes fiscales, selon la même source.
Mais les besoins bruts de financement devraient encore augmenter à 16% du PIB en 2023, contre 12,6% en 2022, en raison d’un amortissement important de la dette extérieure, le remboursement des intérêts de la dette étant une priorité de l’actuel gouvernement. Cela dit, le déficit du compte courant devrait baisser à 4% du PIB en 2023, (contre 8,6% en 2022), en partie grâce à une saison touristique réussie.
Des projections de croissance encore plus basses, à défaut de réformes
Le même rapport indique que si la Tunisie parvient à surmonter la sécheresse et les difficultés relatives aux financements extérieurs, elle devrait enregistrer une croissance de 3% en en 2024 et 2025. Néanmoins, la Banque mondiale met en garde : « les prévisions de croissance pour 2023 – 2024 restent soumises à d’importants risques de détérioration ».
Car ces projections de croissance seraient encore « plus basses » dans le cas d’un scénario où la Tunisie ne mettait pas en œuvre « des mesures budgétaires et fiscales décisives ». Une probabilité élevée, étant donné l’entêtement du président Kais Saïed à s’écarter ouvertement des recommandations de réformes qu’il juge impopulaires, formulées par le FMI.