Justice. Huit ans de prison supplémentaires pour l’ex président Moncef Marzouki
La chambre pénale auprès du Tribunal de première instance de Tunis a condamné par contumace l’ancien président de la République Moncef Marzouki à une peine de huit ans de prison ferme par contumace. Une sentence de plus dont il écope pour des publications qu’il a faites sur les réseaux sociaux, un verdict « honteux et archaïque » selon l’opposition.
L’ex chef d’Etat en poste de 2011 à 2014 avait ainsi été inculpé suite à une enquête ouverte à son encontre pour avoir « tenté d’intenter à la sûreté de l’État, incité les citoyens à s’attaquer les uns aux autres via une violence armée, et appelé à commettre des actes de meurtre et de vol sur le sol tunisien », conformément aux dispositions de l’article 72 du Code pénal. C’est ce qu’a fait savoir vendredi Mohamed Zitouna, porte-parole du Tribunal de première instance de Tunis. Ce dernier a indiqué que la chambre criminelle du tribunal a condamné Marzouki à huit ans de prison, avec effet immédiat.
Zitouna n’a toutefois pas mentionné la date à laquelle ces déclarations attribuées à Marzouki avaient été publiées, ni le média social via lequel Marzouki avait fait lesdites déclarations. En tournée en Turquie en marge du Arab Council qui se tient à Istanbul, Marzouki n’a pas souhaité commenter ce verdict, occupé à y présenter son dernier ouvrage intitulé « Quel avenir pour la démocratie ? ».
Une accumulation de peines sévères
Ce n’est pas la première fois que depuis l’avènement du régime post coup de force constitutionnel de l’actuel président Kais Saïed, l’ancien président Marzouki est pris pour cible par « une justice aux ordres » pour l’opposition, qui s’évertue à corroborer le vieil adage qui a cours dans le monde arabe à propos des transitions non pacifiées : « J’arrive au pouvoir je te mets en taule, et vice-versa ».
Ainsi dès le 22 décembre 2021, la même juridiction avait rendu une décision condamnant Moncef Marzouki par contumace à 4 ans de prison pour des accusations d’ « atteinte à la sécurité extérieure de l’État », l’ancien président avait alors démenti le bien-fondé de ces accusations, sur fond de soupçons de volonté de sabotage à l’époque à travers ses relations du Sommet de la francophonie auprès des chancelleries occidentales qui comptaient être représentées à Djerba.
Commentant le verdict fin 2021, Marzouki avait déclaré sur sa page officielle que la condamnation avait été « rendue par un misérable juge, sur ordre d’un président illégitime », allusion au président Kais Saïed. Début de novembre 2021, la justice tunisienne avait émis un mandat d’arrêt international contre Marzouki, consécutivement à une déclaration où il reconnaissait avoir œuvré à contrecarrer la tenue du sommet de la Francophonie en Tunisie, prévu la même année.
Pour rappel, au cours de l’année 2023 les autorités ont arrêté une vingtaine de personnalités politiques de premier plan, dont le leader du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi et la leader du PDL nostalgique de l’ex RCD, Abir Moussi. Elles font également face à des accusations de « complot contre la sécurité de l’État », des allégations fleuve niées par ces opposants.
Si le président Saïed a martelé à plusieurs reprises l’indépendance du pouvoir judiciaire, l’opposition l’accuse d’instrumentaliser le pouvoir judiciaire pour poursuivre ceux qui s’opposent aux mesures d’exception qu’il avait instaurées en 2021, installant depuis un imbroglio dans le pays qui résulte en un boycott de la vie politique par l’ensemble des grands partis que compte le pays.