Délit de solidarité : les poursuites judiciaires se succèdent

 Délit de solidarité : les poursuites judiciaires se succèdent

Des personnes participent à un rassemblement devant le Palais de Justice de Boulogne-sur-Mer


Alors que la loi « Asile et immigration » sera examinée au Sénat en juin, les militants accusés de délit de solidarité continuent de défiler devant les tribunaux… 


Choqués


Entre le 23 et le 31 mai, ce sont en tout cinq personnes qui passent devant les tribunaux pour avoir commis le même délit : le délit de solidarité. En avril dernier, après une semaine de débats à l’assemblée nationale, le projet de loi « Asile et immigration » a été adopté par les députés. La question du délit de solidarité n’en est pas réglé pour autant malgré les effets d’annonce : « Ce qui nous choque c'est que les parlementaires, au soir du débat à l'assemblée nationale sur le projet de loi, disaient « ça y est on a abrogé le délit de solidarité ». C'est totalement faux. Il a été modifié » indique Céline Coupard, membre du Syndicat des avocats de France (SAF). Parmi les modifications, l’introduction de la notion « d’aide indirecte » aux migrants, qui pourra entraîner des poursuites en justice…


 


Paradoxe


Samedi dernier (26 mai), Mamoudou Gassama, migrant, a escaladé la façade d’un immeuble à mains nues pour sauver un enfant suspendu dans le vide. Un acte qui lui a valu d’être reçu à l’Elysée et d’avoir obtenu la promesse du Président Macron de la naturaliser. L’avocate, membre du SAF, relève l’ironie de la situation : « On nous parle beaucoup de ce Malien qui a eu un geste d'un courage exemplaire. Sauf que concrètement, les bénévoles d'associations qui ont pu l'aider depuis son arrivée sur le territoire, eux pourraient être poursuivi pour délit de solidarité… ». 


Deux poids, deux mesures


Aujourd’hui (31 mai), au tribunal de grande instance de Gap, deux Suisses et une Italienne comparaîtront « pour avoir franchi la frontière franco-italienne à pied, « en bande organisée », avec des personnes exilées ». Des poursuites qui paraissent sévères, pour Céline Coupard, en comparaisons des « réactions en demi-teintes » des autorités concernant les identitaires et leurs actions pour empêcher les migrants d’entrée en France : « Trois personnes sont aujourd'hui poursuivies, placées en garde à vue et ont été placées en comparution immédiate. Il y a une disproportion entre ce geste de solidarité et un geste de haine, de violence, qui passe finalement inaperçu ».


Appel


« Nous demandons aux sénateurs de mettre un terme à ce délit. Soit en l'abrogeant directement, soit en formulant de manière à ce que ce principe qu'on a en France, de solidarité et de fraternité, soit respecté » indique l’avocate. Au mois de juin, la loi « Asile et immigration » sera examinée par les sénateurs et sénatrices. Pour les organisations et associations, ce passage au Sénat ne sera pas la dernière chance de faire abroger le délit de solidarité. Outre un nouveau passage à l’assemblée nationale, le conseil constitutionnel est d’ores et déjà saisi d'une question prioritaire de  constitutionnalité, sur ce délit de solidarité.


Charly Célinain