Jugement attendu le 17 décembre dans l’affaire Sadri Fegaier et Indexia
Si le dossier fait grand bruit en France, ce n’est que récemment que les médias nationaux tunisiens se penchent sur le méga procès en cours du businessman d’origine tunisienne Sadri Fegaier (45 ans). Peu connu en Tunisie, celui que l’on qualifie de magnat autodidacte de l’assurance connaît une déchéance aussi fulgurante que son ascension qui l’avait propulsé au rang de plus jeune milliardaire de France, 71ème plus grande fortune française (1,7 milliard d’euros).
Véritable personnage balzacien, Fegaier (nom de famille signifiant littéralement « pauvre » en arabe dialectal) est né à Bourg-de-Péage dans la Drôme, dans un milieu très modeste. Fils d’un père chauffeur routier et d’une mère femme de ménage, tous deux d’origine tunisienne, qui quittèrent la Tunisie pour s’installer en France dans les années 70. Il se prévaut de n’avoir qu’un BTS en guise de cursus scolaire.
Dès 1999, alors qu’il n’a que 20 ans, il fonde la Société française d’assurances multirisques (SFAM), qui propose dans ses boutiques franchisées un service d’assurance dit multi-risques pour les téléphones portables, un marché alors en pleine expansion. La SFAM adopte ensuite le nom de Indexia Group. En février 2018, il acquiert 11,34 % du capital de Fnac Darty, un groupe qui pèse plus de sept milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Selon son entourage mais aussi une partie de l’opinion tunisienne, c’est là que les ennuis commencent : certains verraient en effet d’un mauvais œil l’appétit du jeune tunisien qui lorgne sur l’un des fleurons de la grande distribution française. Une explication néanmoins un peu courte pour les 1600 parties civiles qui se disent victime d’escroquerie.
« Ils s’échangent nos RIB »
Sadri Fegaier et son groupe Indexia comparaissaient en septembre 2024 pour « pratiques commerciales trompeuses » devant le tribunal de Paris. Pendant le procès, des centaines de plaignants ont dénoncé de nouveaux prélèvements « abusifs » sur leurs comptes bancaires. Le 2 octobre 2024, le Parquet a requis les peines maximales à l’encontre du fondateur du courtier en assurance SFAM et de six de ses sociétés.
Pendant dix ans, le groupe Indexia a vendu des contrats d’assurances pour téléphones portables et appareils électroniques. Mais ces dernières années, la vente jugée agressive de ces contrats, souvent effectuée par des rabatteurs dans la rue, aurait tourné à la prédation selon les victimes présumées, notamment via la vente associée de packs incluant divers produits hi-tech. L’association de consommateurs l’UFC-Que choisir a recueilli des témoignages de clients affirmant avoir remarqué de nouveaux prélèvements non autorisés sur leurs comptes bancaires ces derniers jours, alors même que l’entreprise est devant le tribunal.
Dans ce procès colossal, les consommateurs estiment avoir été « pris au piège » par les contrats souscrits avec les entreprises de Sadri Fegaier : « Certains consommateurs ont perdu plus de 20.000 euros », relate Maître Rachel Nakache, l’avocate qui représentait environ 300 clients lors du procès. Ces derniers assurent être parfois prélevés par huit mandataires différents, des prélèvements plusieurs fois par mois, des sommes en augmentation, avec une quasi impossibilité de résilier les contrats. « Ils se donnent nos RIB les uns aux autres », assure une plaignante.
Sadri Fegaier encourt au total dix-huit mois de prison, 300 000 euros d’amende et une interdiction de gérer une société pendant cinq ans. Son jugement sera rendu le 17 décembre.