Journalistes agressés le 14 janvier : la profession s’inquiète de la dérive liberticide
La police tunisienne a utilisé des canons à eau pour repousser les manifestants hostiles au président Kais Saied. Plusieurs ONG rapportent de nombreux cas de violences à l’encontre des manifestants, ainsi que des journalistes. Le correspondant du journal Libération a notamment été roué de coups à l’arrière d’un fourgon de police selon des témoins.
Environ un millier de manifestants se sont ainsi vus empêcher d’atteindre le centre de Tunis vendredi 14 janvier. La police a violemment agressé au moins un journaliste alors qu’il couvrait la manifestation. Le journal français Libération a en effet déclaré que son reporter en Tunisie, Mathieu Galtier, a subi à de graves violences de la part de policiers. Ces derniers l’ont pris à partie alors qu’il filmait une attaque violente contre un manifestant.
« Ils ont commencé à me frapper, j’étais au sol, recroquevillé dans une position fœtale. Je criais que j’étais journaliste. L’un d’eux m’a aspergé de gaz… Ils m’ont donné un coup de pied et ont pris mon téléphone, ma carte de presse », raconte M. Galthier. Le site d’informations Hakaekonline a également rapporté que la police a saisi le téléphone de sa correspondante avec lequel elle filmait la manifestation.
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Si elles ne sont pas inédites, les violences contre la presse se font de plus en plus régulières depuis le coup de force du président Kais Saied en juillet 2021. Pour Mehdi Jlassi, président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), « la liberté de la presse est plus que jamais menacée ». Il déplore les nombreuses atteintes à la profession, notamment un nombre croissant de « poursuites contre des journalistes et des blogueurs ». M. Jlassi a d’ailleurs annoncé l’intention du SNJT de porter plainte après les violences de vendredi.
Le correspondant de Libération roué de coups
L´Association des correspondants étrangers en Afrique du Nord (NAFCC) a également condamné « un niveau de violence jamais connu depuis la création de NAFCC en 2014 ». Pour le NAFCC, les policiers ont agressé Mathieu Galtier, parce qu’il « filmait une arrestation musclée » et malgré le fait qu’il avait présenté « l’accréditation accordée par les autorités tunisiennes ».
Des pompiers lui ont prodigué les premiers soins sur place. Il a ensuite « été emmené dans un commissariat proche où ses effets personnels lui ont été rendus », explique le NAFCC. Mais, la carte mémoire « de son téléphone, sur laquelle étaient enregistrées les images et vidéos de son reportage, a été retiré ». L’association demande l’ouverture « sans délai » d’une enquête sur cette agression.
Selon le médecin qui l’a examiné aux urgences, le journaliste français a entre autres « une ecchymose au bras droit, des contusions au niveau du dos, de la partie supérieure et abdominale et un œdème au pied gauche ». Il lui a prescrit quinze jours de repos. Outre Libération, Mathieu Galtier collabore régulièrement avec le magazine Jeune Afrique et la radio publique RFI. Ce journaliste estimé de ses confrères est basé à Tunis depuis six ans.