Intoxication alimentaire : Condamnation d’Air Algérie reconnue « intégralement responsable » par la justice française
Dans un jugement daté du 21 février et rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny (93) que Le Courrier de l’Atlas a pu consulter, Air Algérie a été reconnue « intégralement responsable des dommages subis » par sept plaignants, -trois autres demandeurs et la CPAM des Yvelines ont été déboutés-, à la suite des vols du 6 avril 2019, empruntés par ces personnes et affrétés par la compagnie aérienne algérienne.
Il y a cinq ans ans, dix personnes portaient plainte contre Air Algérie, se disant « victimes d’une intoxication alimentaire » après avoir voyagé entre Alger et Paris, le 6 avril 2019. Une intoxication alimentaire qui serait intervenue selon eux après avoir mangé à bord un repas composé de pâtes, de petits pois et d’une tranche de poulet. Plus d’une quarantaine de passagers s’étaient plaints. Certains d’entre eux avaient été hospitalisés en urgence.
Ce 21 février, le tribunal judiciaire de Bobigny a condamné Air Algérie à verser 5 000 € à ceux des demandeurs qui ont fait l’objet d’une hospitalisation et une somme de 2 000 € à ceux qui ont été soignés à domicile.
Tout commence le 6 avril 2019, Inès Anane, artiste franco-algérienne aujourd’hui âgée de 36 ans, arrive chez elle à Paris. Elle vient de voyager avec Air Algérie (voir nos éditions), en provenance d’Alger. Une fois posée sur son canapé, elle ressent de fortes douleurs abdominales. Son état de santé se dégrade et elle finit par être hospitalisée.
Après des analyses, Inès apprend qu’elle a contracté une salmonellose (NDLR : une analyse biologique réalisée par le Groupe Hospitalier Public du Sud de l’Oise conclut à la présence d’une salmonella enteritidis). Inès fait tout de suite le rapprochement avec son voyage sur Air Algérie, persuadée que son intoxication alimentaire a été contractée à bord du vol. Depuis son lit d’hôpital, le lendemain, le 7 avril 2019, elle lance un appel sur les réseaux sociaux, convaincue qu’il y a d’autres victimes.
Elle voit juste : plus d’une quarantaine de personnes lui répondent. Tous ont voyagé avec Air Algérie entre le 6 et le 7 avril 2019. Tous souffrent des mêmes symptômes : fièvres, crampes abdominales, vomissements, diarrhées…
Quand d’autres préfèrent en rester là, Inès Anane réussit à convaincre une dizaine d’entre eux de mener une action en justice contre la compagnie aérienne algérienne. Une décision qu’Inès Anane ne regrette pas aujourd’hui.
« Je suis heureuse que justice nous ait été rendue, réagit auprès du Courrier de l’Atlas Inès Anane. Car ce jour-là, j’ai vraiment cru que j’allais mourir. Nous avons tenté de joindre plusieurs fois Air Algérie pour obtenir des explications. En vain. Au lieu de nous aider à comprendre, nous avons obtenu du silence, c’est-à-dire du mépris. Quand la justice fait son travail, ça donne de l’espoir pour la suite », s’est-elle félicitée.
Le 20 décembre dernier, l’avocat des parties civiles Maitre Schuller avait rappelé que les plaignants ne se connaissaient pas entre eux, ce qui excluait de fait qu’ils auraient pu manger ensemble avant. Un argument qui a convaincu la Cour qui précise dans son jugement que « dès lors, au vu du grand nombre de personnes affectées, du fait qu’elles sont étrangères les unes par rapport aux autres, de la simultanéité de l’apparition des symptômes et de l’identité des bacilles détectés, le tribunal conclut au fait que les plaignantes démontrent l’existence d’un faisceau d’indices suffisant pour faire d’une intoxication liée aux plateaux-repas de Air Algérie l’hypothèse de loin la plus vraisemblable à l’apparition de leurs maux ».
La Cour a rappelé que pour les demandeurs qui ont pu faire réaliser des analyses médicales, la même bactérie a été systématiquement retrouvée dans leurs organismes : à savoir la salmonella enteritidis. Pour le tribunal, il ne s’agit donc pas d’un hasard, comme l’avait laissé entendre l’avocat d’Air Algérie, à l’audience du 20 décembre dernier. Le conseil de la compagnie aérienne rejetant la responsabilité de l’intoxication alimentaire, arguant que « l’origine de l’infection était toujours inconnue ». Pour le transporteur aérien, comme l’immense majorité des passagers de ce jour-là n’était pas tombée malade, Air Algérie ne pouvait être tenue responsable de ces intoxications alimentaires.
2 817 plateaux repas auraient été fournis à bord des vols Air Algérie qui ont opéré le 6 avril 2019 à travers le monde.
Des explications peu crédibles donc pour la Cour qui a reproché à Air Algérie de n’avoir produit aucune pièce qui « viendrait combattre le faisceau d’indices constitué par les demandeurs, de sorte que la preuve du lien causal entre l’apparition des symptômes et la consommation des plateaux-repas servis par la Compagnie Air Algérie le 6 avril 2019 est rapportée ».
Air Algérie a un mois pour faire appel.