Immigration. Les croisades de Retailleau

 Immigration. Les croisades de Retailleau

Le nouveau ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau en conférence de presse lors d’une visite d’un commissariat de police à La Courneuve, dans la banlieue nord de Paris, le 23 septembre 2024. (Photo Dimitar DILKOFF / AFP)

« Un temps nouveau »: il semble que les formules égrenées par Emmanuel Macron soient comprises au quart de tour par ses ministres. En tout cas, le nouveau ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a retenu la nécessité de jeter à la mer tous ces Arabes et autres Africains qui viennent manger le pain des Français (si encore il y a toujours du pain pour les Français bien sûr).

 

Exit le chômage, oubliée l’inflation, à la trappe le déclassement de l’Hexagone et pas de quoi s’alarmer du silence de la France face aux exactions d’Israël qui se met au garde à vous pour opérer un remake de son scénario macabre de Gaza sur les pauvres Libanais – déjà affamés par une crise économique sans précédent -, avec le lot de morts que l’on a du mal à comptabiliser vu la rapidité des massacres commis par Tsahal.

Rien de tout cela ne peut passer avant la volonté d’en découdre avec les immigrés. En moins de quarante-huit heures, le ministre de l’Intérieur est allé au Figaro pour crier son exacerbation et sa colère de voir autant d’Arabes en France. « Trop c’est trop ! Un pays n’est pas un hall de gare », s’est-t-il épanché avant d’annoncer sa ferme volonté de donner un « coup d’arrêt » au « désordre migratoire ».

Au menu du nouveau patron de la place Beauvau, restriction, ou plutôt suppression, de l’aide médicale d’État, retour de la pénalisation de l’immigration avec le rétablissement du délit de séjour irrégulier, pressions sur les pays nord-africains pour accélérer les expulsions… Plastronnant sur les plateaux de TF1, le patron des sénateurs LR s’est gargarisé d’avoir été l’un des acteurs clés du durcissement de la loi immigration la plus ultra-réactionnaire de l’histoire de France.

Une loi qui a fait paraître Marine Le Pen comme une enfant de chœur sur ce sujet, oubliant au passage que les Français, en refusant de donner leurs voix au RN, ont montré qu’ils n’adhéraient pas du tout aux visées racistes de l’extrême droite. Que nenni, trop content d’avoir enfin accès à un strapontin ministériel, Retailleau veut montrer à son président qu’il « lavait bien plus blanc que Darmanin ».

Non content de vouloir en découdre ici et maintenant avec les immigrés, Retailleau compte user de décrets pour contourner les blocages à l’Assemblée, pour mettre ses troupes en rang au service de la chasse aux étrangers.

Raciste Retailleau ? N’exagérons rien, le décret qu’il prépare pour supprimer l’aide médicale d’État, garantirait quand même une « aide médicale d’urgence » qui ne prendra en charge que les soins curatifs dans les cas de risques mortels ou particulièrement graves, même si elle créera des immigrés corvéables et taillables à merci et d’autres, indésirables et qui devraient s’invisibiliser avant de dégager, de gré ou de force.

En toute logique, ces soins seront refusés « aux criminels de l’immigration » du moment qu’ils sont sans visa ou détenteurs d’un visa expiré, risquant ainsi jusqu’à un an de prison et 3 750 euros d’amende.

Nul doute que les Français n’attendaient que l’arrivée de l’ancien chef des sénateurs Les Républicains pour les défendre de ces hordes d’immigrés, lorgnant sur la générosité de la protection sociale et des conditions de vie idylliques qui menacent leur bonheur de vivre dans ce pays constituant le meilleur des mondes possibles.

Un monde qui serait impossible sans ces cohortes d’immigrés qui ramassent les ordures des Français, qui changent les couches des vieillards dans les Ehpad, qui construisent les bâtiments et qui font les urgences dans les hôpitaux.

 

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Abdellatif El Azizi