Gaza : Trump aurait-il réveillé les pays arabes ?

 Gaza : Trump aurait-il réveillé les pays arabes ?

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Le docteur en Sciences Politiques, chercheur en géopolitique et auteur du livre « Donald Trump, retour vers le futur » aux éditions Mareuil, Sébastien Boussois revient sur les initiatives des pays arabes pour reconstruire Gaza face aux déclarations de Donald Trump.

Depuis plusieurs jours, les pays arabes se sont réveillés pour proposer un contre-projet pour reconstruire Gaza en réaction aux déclarations tonitruantes de ces dernières semaines de Donald Trump. Le 4 mars dernier, la Ligue Arabe, qui avait partiellement disparu depuis le début de la guerre, tente un retour en force pour peser sur le sort des millions de Gazaouis pris en étau entre les souhaits israéliens, ceux des Etats-Unis, et l’impuissance de la communauté internationale. Vider Gaza de ses habitants serait certes totalement contraire au droit international, mais sans vision concrète et réaliste de l’avenir de ce territoire enclavé et détruit et capacité d’imposer la paix, quelle vie pour les Palestiniens sur place, si ce n’est le risque d’un nouveau basculement dans la violence ? 

Les Emirats arabes unis, partenaires de l’Etat hébreu depuis les accords d’Abraham signés sous le premier mandat de Donald Trump, ont beaucoup d’idées pour faire de Gaza une nouvelle Dubaï. C’est pour cela qu’ils ont apporté leur soutien au plan de Donald Trump lorsqu’il annonçait la possibilité de faire de Gaza une nouvelle riviera. Les pays arabes réunis plusieurs fois ce mois-ci ne sont évidemment pas d’accord et suivent plutôt les propositions de l’Egypte, qui a concocté un nouveau projet, et du Qatar, médiateur de la guerre entre le Hamas et Israël depuis plus de 17 mois. 

Alors que la guerre a fait rage après les attaques de l’organisation islamistes contre Israël le 7 octobre 2023, qu’un cessez-le-feu a été décroché à l’arrivée de Donald Trump en janvier dernier, personne n’a jamais trouvé la solution idoine pour Gaza afin d’éloigner définitivement la haine, la violence, et les attaques entre Israéliens et membres du Hamas. Depuis des mois, Netanyahou gère au jour le jour la situation explosive, repoussant chaque jour un peu plus comme les islamistes le jour où il faudra faire la paix et envisager la reconstruction. Quand aura lieu le premier jour du reste de leur vie mettant fin au cycle de violence tragique qui a vu trop de morts des deux côtés depuis 2023 ? 

Il faut un plan solide pour sortir Gaza de l’ornière si l’on opte pas pour un départ des Gazaouis, vers les pays arabes et la Cisjordanie, là où un avenir potentiellement meilleur pourrait leur être offert. Les pays de la Ligue arabe sous la houlette de l’Arabie Saoudite avaient proposé un plan de paix en 2002, permettant la création de l’Etat palestinien, mais qui n’a jamais vu le jour. Ce que l’Egypte essaie d’impulser, au sein du concert des pays arabes où elle joue le rôle d’intermédiaire, de par sa relation à Israël. Le Qatar lui pèse pour n’avoir jamais lâché les Palestiniens. Il soutient l’option pour les deux millions de Gazaouis de rester évidemment sur place, ce qui n’est intimement pas vraiment la vision de son rival émirati.

On parle de 50 milliards de dollars de reconstruction mais il ne suffit pas juste de reconstruire des bâtiments, il faut y semer de nouveau les graines de la vie pour la survie, la sécurité des Gazaouis mais aussi des Israéliens. Une fois encore, Doha va jouer un rôle décisif dans la médiation entre tous les acteurs régionaux puisqu’il annonçait la visite de l’envoyé spécial américain, Steve Witkoff, auprès des ministres de la Ligue arabe, pour discuter du plan arabe. Une fois encore, Donald Trump, par la pression maximale, aura peut-être réussi à réveiller les consciences, et à pousser les pays de la région à prendre leur propre responsabilités. De toute façon, ils ont plus d’intérêt à pousser à une solution régionale pour Gaza à Gaza, parce qu’au fond, ils ne veulent pas accueillir davantage de Palestiniens sur leur territoire. C’est le bon sens commun comme dirait le Président américain. En attendant Doha continue à gérer la question du Hamas, qui voit son destin de plus en plus contrarié et devrait être écarte de la scène politique gazaouie. Ce que tous les acteurs locaux souhaitent quelque part, à commencer par le Qatar lui-même qui n’a pas une sympathie outre-mesure pour cet « infréquentable » qu’il tente de gérer tant bien que mal sur demande américaine depuis trop d’années