Fwad Darwich : « La musique marocaine et le jazz se marient très bien »
L’album de Fwad Darwich and the new dialects est un petit bijou. Envoutant, relaxant et riche musicalement, le quartet du bassiste marocain emmène l’auditeur vers un univers jazz avec des musiques gnawa, chaabi, etc. Retour avec Fwad Darwich sur la genèse de l’album Dialects
Comment êtes vous venu à la musique ?
Fwad Darwich : Je suis né et j’ai vécu à Casablanca jusqu’à mes 27 ans. Je n’avais personne qui était musicien dans ma famille. Par contre, mes parents étaient des mélomanes. Ils pouvaient écouter autant de la musique classique arabe, des musiques de films que de la chanson française ou américaine. A force d’écouter, on s’intéresse à l’instrument. A l’âge de 17 ans, j’ai commencé par la guitare en autodidacte, pour faire de la musique un peu comme Jimi Hendrix
Vous commencez dans un univers rock et surtout vous passez à la basse. Pourquoi ce choix ?
Fwad Darwich : Comme beaucoup d’ados de l’époque, j’écoutais Iron Maiden, Metallica ou Dire Straits. Mon premier groupe, Made in Hell avait des influences rock. Les conditions pour faire de la musique au Maroc étaient difficiles. A 22 ans, je me suis mis à la basse. J’ai appris seul et la plupart du temps, je jouais sur les cordes hautes de la guitare. J’habitais un quartier reculé de Casablanca (« la ferraille »). Un jour, mon frère a remarqué que je n’étais pas guitariste mais bassiste. Mon oreille allait plus vers le bassiste plutôt que la guitare. Je cherchais des bassistes leader, avec un rôle important pour cet instrument comme dans les groupes Iron Maiden ou Led Zeppelin. Je suis venu pour la musique. J’ai commencé à donner des cours de basse dans plusieurs écoles à Montpellier, Pérols, Clapiers.
Comment se crée le groupe « Fwad Darwich and the Dialects » ?
Fwad Darwich : j’ai commencé à écouter un guitariste, Norman Brown, un élève de Georges Benson. Il jouait du smooth Jazz. On est dans un univers funk mais avec un phrasé jazz. Je me suis plongé dans l’univers de jazz. Parallèlement, le mal du pays m’a rattrapé mais j’ai écouté Nass El Ghiwane, Jil Jilala, etc.. J’ai découvert une musique très riche, notamment l’univers du guembri. Les musiques marocaines, que j’écoutais peu au Royaume, sont des mines d’or. Que ce soit le gnawa, l’houara, le chaabi, j’ai commencé à creuser ces univers pour l’analyser. Je voulais jongler avec cette musique, avec les rythmes en 7/8 de Houara, ou le 5/4 des Issawas. Le groupe se crée en 2009-2010.
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Au vu de leurs origines, est ce que le jazz et les musiques marocaines se marient bien ?
Fwad Darwich : Oui, le jazz et le gnawa se marient très bien. Ca ne se fait pas facilement car il faut s’imprégner des deux univers. Cela dépend de ce que l’on veut donner comme teinture au mélange. La difficulté pour les musiciens occidentaux, c’est de se situer rythmiquement. La plupart des rythmes marocains marque le temps fort en l’air contrairement à la musique occidentale. Mon but est de faire un clin d’œil ou deux à différents rythmes du Maroc. On a une dizaine de chansons dont une reprise (Footprints) avec des rythmes chaabi et gnawa. On est en train de chercher un tourneur pour pouvoir intégrer les musiques du monde ou l’univers du jazz prolifique en France.
Que pensez vous de l’univers jazz au Maroc avec la présence de nombreux festivals ?
Fwad Darwich : On s’intéresse de plus en plus au jazz. La fusion avec le jazz n’est pas nouvelle. Les Marocains ont toujours fusionné leurs musiques avec les différentes influences musicales. Le jazz peut sortir de son cadre élitiste. C’est une musique qui a ses codes qui fait une part belle à l’improvisation. Il faut apprendre le vocabulaire jazz pour désapprendre ensuite. C’est une musique qui demande beaucoup de travail mais qui s’écoute avec le cœur et s’imprégner.
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