« Zyed et Bouna », le récit d’un morceau de vie

 « Zyed et Bouna », le récit d’un morceau de vie

« Zyed et Bouna »


 


Il s’agit d’un récit et non d’une enquête. « Zyed et Bouna », de Gwenaël Bourdon, avec Adel Benna et Siyakha Traoré, paru aux éditions « Don Quichotte », a été écrit quelques semaines seulement après la relaxe des deux policiers jugés pour non assistance à personne en danger. 


 


Cet ouvrage se veut « une réponse indirecte aux petites phrases » qui ont accueilli le jugement. Parmi lesquelles, on s’en souvient, Marion Maréchal-Le Pen et son tweet : « Ce verdict prouve que la racaille avait bien mis la banlieue à feu et à sang par plaisir et non à cause d’une bavure policière », sans oublier les propos de Christian Estrosi, maire UMP de Nice, « Les familles n’ont qu’à éduquer leurs enfants et faire en sorte qu’ils ne soient pas des délinquants ».


 


Masque de douleur


Le récit des deux grands frères débute par l’histoire des familles de Zyed Benna et Bouna Traoré. Et au fil des pages, les mots incarnent le souvenir de ceux que tout le monde appelle « Zyed-et-Bouna ». Bouna, « On dit de lui qu’« il sait ce qu’il veut » ». Zyed envisageait de devenir plombier et rêvait de s’installer à Paris. Dans ce livre, on apprend que le jour du drame, Zyed Benna voulait rester chez lui, jouer à la Playstation. Il ira finalement rejoindre ses copains pour jouer au foot, au terrain de Livry, situé « à 20 minutes à pied ». L’ouvrage raconte ensuite la façon dont les membres de la famille ont appris la mort de leur enfant, de leur frère. Il y a Muhittin, le troisième jeune présent dans le transformateur EDF qui a survécu au drame et qui a dû annoncer le drame à Siyakha, en lui tombant dans les bras : « il semble sans force, son visage n’est qu’un masque de douleur ». Il y a aussi la mère de Zyed qui l’apprend à son mari puis « s’effondre sur le sol ».


 


« Le père a reçu ces déclarations comme un gifle » 


Le livre décrit également le profil des pères de famille. Amor Benna, employé de la ville de Paris depuis 1972 », tout comme le père de Benna Traoré d’ailleurs, et « éternel contractuel, jamais titularisé au sein du service, faute d’avoir obtenu la nationalité française ». Il y a cette scène très marquante, dans le salon de la famille Traoré. Le lendemain de la mort de Zyed et Bouna, le père, Seydou Traoré, s’assoit devant sa télévision pour regarder le journal de 20h, qu’il ne rate jamais. « Le visage du ministre de l’Intérieur est apparu à l’écran, et le père a reçu ces déclarations comme un gifle ». Les familles des victimes refuseront d’abord de rencontrer Nicolas Sarkozy, ce qui ne l’empêchera pas de s’inviter dans le bureau de Dominique de Villepin lorsque le Premier ministre les convie à Matignon. Nicolas Sarkozy, « A lui, je lui en veux », dira encore Amor Benna, le père de Zyed, après l’annonce de la relaxe des policiers en mai dernier. 


 


Chloé Juhel


« Zyed et Bouna », de Gwenaël Bourdon, avec Adel Benna et Siyakha Traoré, paru aux éditions « Don Quichotte »