Violences au lycée Suger (Saint-Denis) : l’intervention musclée de la police est questionnée

 Violences au lycée Suger (Saint-Denis) : l’intervention musclée de la police est questionnée


Violences, évacuation, interpellations, le 7 mars dernier l'ambiance entre les élèves du Lycée Suger et les policiers était électrique. Sauf que la version officielle détonne un peu de la version des parents d'élèves qui tentent aujourd'hui de faire toute la lumière sur ces événements. En cause, le manque d'effectif, et par extension le manque de moyens, dans les établissements de Seine-Saint-Denis…


Besoin de personnel


« Nos enfants ont besoin d’enseignants et d’éducateurs, pas de policiers violents » tel est l'appel des  parents d'élèves adressé au ministère de l'Education nationale et celui de l'Intérieur. Et pour cause, alors que des grèves ont eu lieu en septembre dernier pour réclamer plus de moyens, les problèmes de sous-effectifs sont récurrents.


C'était notamment le cas le 7 mars dernier selon Jean-Jacques Clément, parent d'élève élu au conseil d'administration depuis 6 ans : « Le mardi en question (7 mars), en termes de personnel vie scolaire, en comptant proviseur, proviseur adjoint et gestionnaire. Ils étaient dix au maximum… Il y avait une CPE présente quand les incidents se sont déclenchés. Normalement, il y a trois CPE en place ».


Dix membres du personnel pour environ 900 élèves, et là encore les chiffres varient : « Nous avons rencontré la proviseure, lundi (20 mars), qui nous a confirmé que les évacuations se sont faites par groupes de 20 en 20 minutes. Et aujourd'hui (mardi 21 mars), en réaction à notre lettre ouverte, elle a déclaré que 1200 élèves ont été évacués, alors que jusqu'à présent tout le monde nous disait entre 900 et 1000 élèves. Une différence de 300 élèves, ce n'est pas rien… 1200 élèves en 20 minutes… ».


Un sous-effectif qui aurait donc justifié une évacuation du lycée, après des violences dansl'enceinte de l'établissement.


Relation tendue avec la police


Une fois évacués, une partie des lycéens se sont retrouvés face aux policiers. Pour Jean-Jacques Clément, la réponse de la police a été quelque peu démesurée : « Des groupes extérieurs au lycée ont jeté des projectiles. La police a commencé à fermer les rues et à bloquer ceux qui étaient restés dans le secteur. Selon les autorités, à partir du moment où on ne s'est pas dispersé, on est considéré comme participant au désordre public. C'est comme ça qu'ils ont justifié les 55 arrestations (…) 8 enfants sont vraiment passés au tribunal. 47 gamins sont ressortis parce qu'ils n'avaient rien fait, qu'ils n'avaient rien à voir là-dedans ».


Depuis, malgré les diverses sollicitations des parents d'élèves, le Ministère de l'Intérieur comme le Ministère de l'Education Nationale se font pour le moins discrets concernant cette affaire : « Il semblerait qu'il y ait une volonté de l'Etat de tout étouffer. Pour pacifier les quartiers en difficultés avec la police, on est sur un champ un peu explosif… ».


Beaucoup de questions


Selon certains témoignages de lycéens, les conditions d'interpellation et de garde à vue ont été, pour le moins, rudes. Aujourd'hui, les familles veulent des réponses : « Les familles se sont réunies pour essayer de comprendre la situation. Pourquoi on a fait sortir les enfants alors que la police était dehors ? Pourquoi les pompiers n'ont pas été appelés alors qu'on nous a dit qu'il y avait des incendies dans le lycée ? ».


Les exigences des parents d'élèves sont claires : « Nous demandons, comme certains élus de Saint-Denis, qu'il y ait une commission d'enquête pour savoir comment les événements se sont déroulés. De plus, les familles vont travailler ensemble pour s'occuper des gamins mis en examen. Concernant tout ce qu'il s'est passé pendant les gardes à vue, on ne va pas en rester là non plus (…) Nous verrons quelles actions nous mènerons : Défenseur des droits, IGPN, procureur de la République… Surtout qu'en face la police a décidé de se protéger quoiqu'il arrive ».


Beaucoup de questions, peu de réponses. Ce qui est sûr c'est que depuis l'affaire Théo, nombre d'événements se déroulent dans les lycées d'Ile-de-France, et ce, dans un silence relatif. Pour Jean-Jacques Clément, cette démonstration de force au Lycée Suger n'est pas anodine : « Ils ont choisi le lycée Suger pour faire un exemple à l'adresse de tous les autres lycées de la région parisienne… ».


CH. Célinain