Tariq Ramadan mis en examen dans deux nouvelles affaires

 Tariq Ramadan mis en examen dans deux nouvelles affaires


L'islamologue Tariq Ramadan est désormais mis en examen pour les viols de quatre femmes, qu'il conteste, les juges d'instruction ayant conclu son interrogatoire de jeudi en lui notifiant de nouvelles charges pour l'agression de deux femmes en 2015 et 2016 à Paris, a appris l'AFP auprès de son avocat.


 



 


L'intellectuel suisse, qui était déjà mis en examen depuis le 2 février 2018 pour deux viols, est arrivé jeudi, peu avant 09H30, au tribunal de Paris, plus d'un an après sa sortie de prison et son dernier interrogatoire sur le fond du dossier.


Entre temps, Tariq Ramadan, 57 ans, a tenté sans succès de faire annuler la procédure judiciaire tandis que le parquet de Paris, l'été dernier, a élargi l'enquête à trois victimes potentielles.


Si le récit de l'une d'elles, surnommée "Elvira", n'a pas été corroboré par l'enquête, les juges ont toutefois retenu la mise en examen de l'islamologue pour les deux autres femmes, au terme de près de cinq heures d'interrogatoire.


Ces deux femmes ont été identifiées par la police sur des photos et des messages retrouvés dans l'ordinateur de l'islamologue, parmi sa correspondance avec d'anciennes maîtresses.


Entendues en février 2019, elles ont raconté aux policiers comment ce "manipulateur" les avait entraînées chacune dans une relation "dominant-dominé" virtuelle avant un rendez-vous brutal dans un hôtel parisien.


"Je lui demandais d'être plus doux, mais il me disait: C'est de ta faute, tu le mérites (…) et qu'il fallait obéir", avait rapporté l'une des deux, relatant une rencontre fin 2015.


"C'est d'un autre ordre qu'un viol physique, (…) il y a un viol moral", avait expliqué l'autre, au sujet de deux rencontres en mars 2016 à Paris. "Mais cette relation a été consentie, oui", avait-elle ajouté, "il faudrait une autre infraction pour ce genre de personnes".


Cette dernière, âgée de 37 ans, a fini par se porter partie civile et doit être entendue prochainement par les juges. L'autre femme, âgée de 30 ans, n'a pas donné de nouvelles à la justice à ce jour.


 


"Grotesque"


"Il y a une volonté de poursuivre Tariq Ramadan coûte que coûte et ce contre les évidences", a réagi auprès de l'AFP l'avocat de M. Ramadan, Me Emmanuel Marsigny.


"Alors que les mensonges des premières accusatrices sont désormais clairement établis, il vient d'être de nouveau mis en examen alors que la première femme visée a elle-même déclaré que les relations avaient été +consenties+ et que l'autre femme ne s'est jamais plainte", a-t-il ajouté.


"Cette affaire devient grotesque, elle est surtout très inquiétante par sa dérive et le dévoiement des règles de droit", a-t-il conclu.


Jointe par l'AFP, l'avocate de la plaignante de 37 ans, Me Laure Heinich, a constaté que "les juges n'ont pas eu la même appréciation des faits dénoncés par ma cliente que M. Ramadan", ajoutant que sa cliente "réserve ses déclarations pour les juges d'instruction".


L'affaire Ramadan, qui a provoqué la chute de cette figure charismatique et contestée de l'islam européen, a été déclenchée fin octobre 2017 par les plaintes d'Henda Ayari, une ex-salafiste devenue militante laïque, et "Christelle", qui dénoncent respectivement un viol en 2012 à Paris et en 2009 à Lyon.


Pour ces faits, l'islamologue est mis en examen pour "viol" et "viol sur personne vulnérable".


Une troisième femme, ex-escort girl, Mounia Rabbouj, l'a ensuite accusé de neuf viols sur la période 2013-2014. Pour ces faits, il n'est pas poursuivi.


Après avoir nié toute relation avec ses deux premières accusatrices, Tariq Ramadan avait fait volte-face en octobre 2018, après neuf mois de dénégations. Il plaide désormais des "relations consenties".


Henda Ayari et "Christelle" ont dû s'expliquer sur leurs nombreux messages crus avec l'intellectuel, jugés "ambivalents" et "fluctuants" par les enquêteurs, y compris après les faits.


Une expertise psychiatrique est en cours pour déterminer si les liens instaurés par Tariq Ramadan avec ces femmes "relèvent d'une relation d'emprise".


Libéré le 16 novembre 2018, après presque 10 mois de détention, l'islamologue a remis ses passeports suisse et britannique et est interdit de quitter la France.