Sept hommes pris en flagrant délit d’agression de migrants près de Dunkerque

 Sept hommes pris en flagrant délit d’agression de migrants près de Dunkerque

La police a arrêté pour la première fois des agresseurs de migrants pris en flagrant délit (illustration). Valery Hache/AFP


Pour la première fois, la police a pu mettre la main sur des personnes commettant des violences sur des migrant dans la commune de Loon-Plage, limitrophe de Dunkerque (Nord). Depuis l'été, de mystérieuses agressions ont été signalées, certaines associations évoquant même l'existence de « milices », voire de « ratonnades ». Les plaintes étaient rares cependant, les victimes rechignant souvent à se rendre au commissariat en raison de leur situation irrégulière.


 


Barre de fer et bombe lacrymogène


Dans la nuit de mercredi à jeudi, des fonctionnaires de la police judiciaire sont parvenus à surprendre sept hommes, âgés de 24 à 44 ans, pour certains originaires du Pas-de-Calais, auteurs d'agressions sur quatre Kurdes irakiens, les blessant légèrement, selon le parquet de Dunkerque. Il s'agit de la première annonce publique de ce type. La police a retrouvé trois barres de fer et une bombe lacrymogène sur les lieux de l'agression.


« Leur garde à vue, débutée à 1 h du matin, a été prolongée de 24 heures. À l'issue, j'envisage de demander l'ouverture d'une information judiciaire, au vu des longues investigations, de la nature des faits et du contexte », a indiqué Éric Fouard, procureur de la République de Dunkerque, précisant que « certains sont identifiés comme appartenant aux mouvements anti-migrants de Calais » et que leur mobile « apparaît comme idéologique et non crapuleux ».


 


Recrudescence et impunité des agressions contre les migrants


Détail qui retient l'attention : l'agression a eu lieu à Loon-plage, le terminal du port de Dunkerque, où les migrants, venus principalement du camp tout proche de Grande-Synthe, stationnent habituellement la nuit pour tenter de grimper dans les camions allant en Grande-Bretagne par ferries, et non à Calais ou ses environs, où la plupart des actes de violence ont été signalés. « C'est la première fois que j'ai un acte similaire sur mon ressort », a d'ailleurs souligné M. Fouard.


En octobre, le parquet de Boulogne-sur-Mer, dont dépend Calais, avait ouvert une enquête préliminaire, confiée à la police judiciaire de Lille, à la suite d'actes d'agressions « répétés » à l'encontre de migrants dans le Calaisis. Alors que certains médias accusaient la justice et la police de « laxisme » dans ce dossier, le parquet de Boulogne-sur-Mer avait rappelé que les enquêtes étaient « longues et difficiles », les agressions se déroulant souvent la nuit, dans des lieux sans vidéo-surveillance, avait indiqué Jean-Pierre Valensi, procureur de Boulogne-sur-Mer. Une information judiciaire a également été ouverte début février pour l'agression avec arme de trois Syriens dans la nuit du 20 au 21 janvier à Calais, où campe la majorité des migrants sans abri de la région.


D'après Isabelle Bruand, coordinatrice régionale de Médecins du monde (MDM), il y a une « recrudescence » des agressions sur des migrants depuis le début de l'année. « Des dizaines de personnes ont été tabassées à Calais avec notamment des barres de fer, provoquant plusieurs fractures ». Pour Marianne Humbersot, chef de mission au centre juridique informel de la « Jungle », une « cinquantaine de personnes » ont été victimes de violence depuis janvier, qui seraient notamment l’œuvre de « milices cagoulées et surarmées ».


Rached Cherif