Plaintes déposées contre M6 après le reportage sur la banlieue
Le reportage a été diffusé il y a 10 jours. Le temps qu’il faut pour déchaîner la colère des habitants et associations de quartiers qui estiment avoir été diffamés par l’émission « Zone interdite » sur M6. Le fixeur et une association locale ont décidé de porter plainte.
Un concentré de clichés et de poncifs sur la banlieue qui a valu à l’émission le doux surnom de « Amalgame interdite » sur les réseaux sociaux. Sur Twitter, même Laurence Parisot, l’ancienne patronne du Medef y est allée de son « Lamentable le reportage de #ZoneInterdite ». Au-delà de l’indignation numérique, plusieurs plaintes ont été déposées contre la chaîne et la boîte de production.
Double production
Le titre de l’émission était « Quartiers sensibles : le vrai visage des nouveaux ghettos ». La première partie a été produite par Giraf Prod, elle évoquait le communautarisme musulman et le trafic de drogue (sic). Juste derrière, un second reportage a été diffusé, il portait sur les mères seules qui ont du mal à élever leurs enfants, la boîte de production s’appelle Yemaya Productions.
« Des barbus, des djellabas et des dealers »
Sur la première partie, le fixeur de l’équipe a l’intention de déposer plainte. Il s’appelle Mathias Quiviger et il raconte que la production souhaitait « des barbus, des djellabas, des musulmans qui font la prière, des dealers… » Giraf Prod aurait également payé des jeunes pour qu’ils puissent filmer du deal, ce dont la production se défend. Pour elle, il s’agissait de donner « simplement un peu d’argent pour qu’ils achètent des gâteaux et des bonbons aux enfants du quartier qui étaient autour de nous ».
« Tu n’as jamais pensé à prendre la pilule ? »
Concernant le second reportage, ce sont les Jeunes communistes de Bobigny-Drancy qui doivent déposer plainte ce lundi pour diffamation. Dans un communiqué, ils disent vouloir dénoncer ce qu’ils appellent de « la propagande racoleuse, mensongère et réactionnaire ». Et ils s’offusquent tout particulièrement d’un passage du reportage où l’on voit à l’écran une mère de famille âgée de 30 ans, qui a 5 enfants de 4 pères différents. La question du journaliste qui fait bondir les Jeunes communistes de Bobigny-Drancy : « Tu n’as jamais pensé à prendre la pilule ? »
« Encore plus énervé que d’habitude »
D’autres associations devraient également porter plainte, et cette fois de façon collective. Nadir Kahia, le président-fondateur de Banlieue +, s’est rendu au siège de M6 pour déposer un courrier à l’adresse du patron de la chaîne. « Le soir de la diffusion du reportage, j’étais encore plus énervé que d’habitude. La seule façon d’engager un rapport de force, c’est de porter plainte », explique celui qui a créé Banlieue + précisément pour tenter de rétablir une image positive des quartiers.
La jurisprudence « Envoyé spécial »
On se souvient d’un précédent cas avec le reportage d’« Envoyé spécial » sur la cité de La Villeneuve, à Grenoble. Les habitants avaient attaqué France Télévisions en diffamation. C’était en mai 2014. La justice avait estimé que la plainte n’était pas recevable, mais le CSA avait recadré l’émission.
Chloé Juhel