Le réalisateur égyptienYousry Nasrallah et son ode aux « gens du peuple »

 Le réalisateur égyptienYousry Nasrallah et son ode aux « gens du peuple »

Le réalisateur égyptien


Présent en France, au festival des 3 continents (28 novembre – Nantes), pour l’avant-première de son nouveau film « Le Ruisseau, le pré vert et le doux visage », le réalisateur égyptien Yousry Nasrallah a prouvé une nouvelle fois qu’il avait des choses à dire, que ce soit caméra à l’épaule ou micro en main. Sept ans après son dernier film, dans ce nouveau long-métrage, le réalisateur dépeint un peuple égyptien bravant les interdits et osant vivre librement ses désirs.


Audace et maîtrise


Dès les premières images du film, le ton est donné. Mélange de comédie, drame et satire avec des personnages, hauts en couleurs, au sens propre comme au figuré. Au centre de cette histoire, une famille de restaurateurs-traiteurs, qui tous, vont aller à l’encontre des comportements convenus et des traditions dans des histoires d’amour où le désir l’emporte sur la bienséance. Oser vivre, oser la liberté, semble vouloir dire le réalisateur. Politiciens, riches entrepreneurs, militaires et les gens du peuple, tous sont réunis dans cette histoire où les héros arrachent finalement leur liberté. Comme un écho, ou plutôt une fin rêvée, par rapport à tous les bouleversements survenus en Egypte, et dans le monde arabe ces cinq dernières années. Yousry Nasrallah, réalisateur irrévérencieux pointant avec finesse les défauts et les qualités de son Egypte qu’il aimerait peut-être plus audacieuse, à l’image des héros de son film.


 


Liberté et censure


Présent dans la salle pour présenter son film, le réalisateur raconte une anecdote qui démontre très bien le paradoxe existant dans la société égyptienne à une certaine époque : « J'étais critique de cinéma à la fin des années 70. Des films comme Emmanuelle ou Histoire d'O [Films érotiques, ndlr], passaient très normalement dans toutes les salles de cinéma. Mais, à mon grand étonnement, le film de Pasolini Les mille et une nuit a été interdit. J'ai été voir quelqu'un de la censure, qui est tenu par la sécurité générale, pour demander pourquoi. Il me regarde et me dit que c'est un film dégoûtant, avec des princesses qui fricotent avec des gens du peuple…moches. J'ai compris que quand il y a du fric, ça marche très bien le sexe. Mais regarder les gens du peuple, des gens simples, s'amuser, exprimer leur désir et leur liberté, sans enjeu financier, ça choque terriblement ».


Aujourd’hui, l’Egypte en a-t-elle fini avec cette façon de penser ? Ce qui est sûr, c’est que des réalisateurs comme Yousry Nasrallah et le cinéma égyptien, reviennent avec une envie de casser les codes et de redonner sa place au peuple.


CH. Célinain