La résistance s’organise contre un « état d’urgence permanent »

 La résistance s’organise contre un « état d’urgence permanent »

CITIZENSIDE / Denis PREZAT / AFP


Alors qu'au mois de juillet, une énième reconduction de l'état d'urgence devrait être annoncée par le gouvernement, c'est bien le projet de loi contre le terrorisme, ayant « fuité » début juin, qui inquiète nombre d'organisations et associations. Celui-ci rendrait permanentes plusieurs mesures de l'état d'urgence en les incluant dans le droit commun, s'il était adopté tel quel. Pour manifester leur désaccord, plusieurs associations appellent à une manifestation, demain (1er juillet), place de la République (Paris).


Mesures exceptionnelles


Alors qu'une sixième prorogation de l'état d'urgence devrait être annoncée ce mois de juillet, organisations de défense des droits de l'Homme et associations appellent à la vigilance. Malgré l'inefficacité de cette mesure d'exception contre les attentats, le gouvernement pourrait faire entrer l'état d'urgence dans le droit commun via un projet de loi sur la lutte contre le terrorisme et pour la sécurité intérieure.


Face à ce projet qui devrait être présenté au Sénat, puis à l'Assemblée nationale, dans le courant du mois de juillet, plusieurs organisations dont le syndicat de la magistrature ou encore la ligue des droits de l'homme (LDH) veulent avertir les citoyens des effets que pourrait avoir cette pérennisation de l'état d'urgence.


Ces mesures (assignations à résidence, perquisitions administratives, mesures de surveillance…) sont exceptionnelles et, pour Malik Salemkour, président de la LDH, elle doit le rester : « Ces mesures exceptionnelles (…) maintiennent l'absence de l'appréciation d'un juge pour vérifier si l'assignation à résidence, la mise en place de bracelets électroniques, sont opportuns et proportionnés aux risques. Là nous serions sur la seule décision d'un préfet qui pourrait prendre des mesures extraordinaires, qui donc seraient attentatoires aux libertés fondamentales ».


Logique de soupçon


Le  projet de loi sur la lutte contre le terrorisme et pour la sécurité intérieure donnerait des pouvoirs  de privation de liberté, d'intrusion dans les domiciles au ministre de l'Intérieur ou au Préfet. Le plus inquiétant c'est que les personnes visées ne se verraient pas nécessairement reprocher une infraction pénale, mais elles pourraient être ciblées sur la base d'un soupçon.


Dans ce projet de loi, plusieurs points posent problème, parmi lesquels la possibilité de créer des périmètres de sécurité sur la voie publique. Comme l'expliquait Laurence Blisson, secrétaire générale du syndicat de la magistrature, début juin, ce genre de détails peuvent être liberticides :


« Ces contrôles qui pourront s'opérer dans le cadre de ces dits « périmètres de protection », ils s'étendent aux événements et aux lieux. Le diable est dans les détails comme d'habitude dans ces textes-là (…) on est vraiment sur une logique qui dépasse ces simples cas pour parler de tout lieu, donc avec une potentialité de surveillance et de fouille dans l'espace public complètement déconnectée de la recherche d'une infraction pénale (…) C'est ça ce que produit l'état d'urgence et ce que produit aujourd'hui ce texte qui veut l'intégrer dans le droit commun. C'est une logique du soupçon dans laquelle on est absolument déconnecté d'une infraction pénale et de ce qu'est le terrorisme ».


Demain (1er juillet), organisations et associations appellent à un rassemblement place de la République (Paris), pour dire non, aussi bien au projet de loi contre le terrorisme qu'à la prorogation de l'état d'urgence. Pas sûr qu'Emmanuel Macron, qui s'était, un temps, dressé contre l'état d'urgence, avant de devenir président, prête une oreille attentive à ces rassemblements…


CH Célinain