La mosquée de Stains autorisée à rouvrir en montrant patte blanche
Le ministère de l’Intérieur a décidé mercredi d’autoriser la réouverture de la mosquée Al-Rawda de Stains, fermée sur décision préfectorale depuis novembre 2016. C’est la première fois qu’un lieu jugé « radical » est autorisé à rouvrir, alors que la France est toujours sous état d’urgence. Cette décision, intervenant à trois jours de la passation de pouvoir à la tête de l’État, est le résultat d’une bataille juridique menée jusqu’au Conseil d’État et de concessions inédites apportées par l’association cultuelle.
La Place Beauvau avait notamment pointé du doigt le fait que plusieurs Français étaient passés par cette mosquée avant leur départ pour le jihad en Syrie. Parmi les centaines de fidèles réguliers figuraient plusieurs figures du jihad, dont Fabien Clain, voix de la revendication des attaques du 13 novembre 2015. En janvier, le Conseil d'État, saisi par l'association dirigeante, le Centre culturel franco-égyptien, avait confirmé la fermeture du lieu de culte.
« L’État est déterminé à lutter contre la radicalisation par tous les moyens de droit et à permettre l’exercice paisible du culte dans le respect des lois de la République », a réagi le ministre de l’Intérieur, Matthias Fekl, mercredi.
Cette décision d’abroger la décision de la préfecture a été motivée par de nombreuses garanties, inédites en la matière, apportées ces dernières semaines aux services de la place Beauvau. Il s’agit notamment du remplacement d’un imam salafiste par deux autres, dont le CV et les affinités ont été passés au peigne fin, explique le journal du soir. De même, des caméras ont été installées à l’intérieur et à l’extérieur de l’édifice.
« Nous avons compris les reproches »
« Lors des procès, nous avons compris les reproches qui nous étaient faits », a déclaré Mohammed Henniche, secrétaire général de l'Union des associations musulmanes (UAM) du 93, qui s'est impliqué dans les discussions de réouverture. Au total, trois imams officieront à tour de rôle, selon Mohammed Henniche. Le but : faire en sorte que la mosquée « ne tombe pas sous l'emprise d'un seul imam », a-t-il dit.
Les gérants du lieu de culte se sont également engagés à constituer une « équipe de vigilance » d'une dizaine de fidèles, selon M. Henniche. Elle sera chargée « d'alerter sur les comportements et les expressions contraires aux valeurs de la République », a détaillé le ministère. Ils devront également créer un site internet – où doit figurer « un message de condamnation des propos tenus par l'ancien imam » – et développer un « contre-discours face aux phénomènes de radicalisation », en faisant intervenir dans la mosquée des « personnalités reconnues » en la matière.
La décision de l'Intérieur est un « signal positif » pour « l'ensemble des lieux de culte aujourd'hui fermés », ont dit dans un communiqué les avocats de l'association, William Bourdon et Vincent Brengarth, engagés dans plusieurs autres procédures relatives à l'état d'urgence. Ils y voient « la possibilité d'un réexamen et la révocabilité de telles mesures ». Une vingtaine de mosquées et salles de prières présumées radicalisées ont été fermées depuis l'instauration de l'état d'urgence après les attentats du 13 novembre 2015.
R.C
(Avec AFP)