La guerre des laïcités aura-t-elle lieu ?
Il est des réponses argumentées face aux propos de Elisabeth Badinter ou Caroline Fourest. Ce livre en est une. « Fatima moins bien notée que Marianne » de François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils vient de paraître aux éditions de L’Aube. Et il y est question de laïcité et d’école.
La République est indifférente aux différences et l’école de Jules Ferry repose sur cette règle très claire : silence sur tout ce qui divise ou pourrait diviser. C’est en rappelant ces deux données bien spécifiques à la France que les auteurs amorcent leur ouvrage. Un livre basé sur une série d’enquêtes empiriques au sein de plusieurs établissements scolaires.
Utiliser les prénoms des élèves
25% des élèves interrogés dans un lycée d’Ile-de-France expriment un sentiment de discrimination. François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils ont voulu pousser leur étude plus loin. Or, en France, la dimension ethnique des discriminations est difficilement mesurable. Alors l’historien et la sociologue ont eu recours à une pirouette souvent empruntée par les chercheurs : utiliser les prénoms des élèves. Et cela, sans pour autant perdre de vue les limites que cette méthode induit.
« Théories implicites des enseignants »
Les données recueillies confirment « la ségrégation ethnique des séries de baccalauréat, les séries les moins rentables socialement étant les plus ségréguées ». Autres résultats : « les théories implicites des enseignants » véhiculent un « double handicap social et culturel au détriment des enfants appartenant à des catégories sociales défavorisées et à ceux d’origine maghrébine ». D’où le titre du livre : « Fatima moins bien notée que Marianne ».
11 septembre et voile
François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils ont également ouvert des livres d’histoire, ceux utilisés à la rentrée 2015, afin de se pencher sur le traitement qui y était fait au sujet de l’islam. Résultat dans les manuels de première par exemple (cf photo en bas) : ils ont constaté le primat de l’islamisation sur l’islam et l’invisibilité de l’islam en France. Deux thématiques sont systématiquement traitées en lien avec l’islam : le 11 septembre et la question du voile à l’école.
Une islamophobie d’école
A la fin de l’ouvrage, les deux auteurs s’interrogent sur cette « machine à trier » qu’est devenue l’école. Ils évoquent une islamophobie dans l’école mais également « de et par » l’école. Et proposent des solutions : refonder des contenus au service d’une politique d’inclusion ; introduire la culture du débat ; ouvrir l’école aux parents ; recruter et former différemment les professeurs ou encore favoriser la mixité scolaire.
Chloé Juhel
« Fatima moins bien notée que Marianne », de François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils, vient de paraître aux éditions de L’Aube.