L’ONU examinera bientôt les abus policiers de la France
L’examen de la France par le Comité contre la Torture (CAT) aura lieu du 18 au 22 avril. A cette occasion, le collectif "Stop le contrôle au faciès" a rendu un rapport alternatif faisant état d’entorses graves à la Convention contre la torture, instaurée par les Nations Unies.
Déjà mentionnées dans le rapport annuel sur les droits de l’homme des Etats-Unis, les violences policières commises en France seront soulignées par le CAT. Les associations du collectif "Stop le contrôle au faciès" seront représentés par des membres d’"Urgence Notre Police Assassine" (UNPA), lors de la session à Genève les 18 et 19 avril. Le but est de « sensibiliser les experts du Comité à ses préoccupations et ses recommandations » selon un communiqué.
Le rapport alternatif signal « des traitements cruels infligés par des agents de la fonction publique, des violences physiques et verbales associées aux contrôles d’identité » mais aussi des « fouilles et palpations dégradantes ». Plusieurs personnes sont mortes pendant ou après des interpellationsextrêmement violentes. Ces actes n’ont pas été sanctionnés à cause de la « non-reconnaissance du statut de victime par l’Etat dans le cadre des abus policiers ». Selon le rapport « Les actes de torture et de traitements inhumains interviennent dans un contexte de discrimination raciale, sociale et religieuse institutionnalisée » et « instaurent un climat d’intimidation ». Près de 2300 témoignages ont été recueillis.
Parmi ces témoignages…
Un témoin de la scène de l’interpellation d’Amadou Koumé, 33 ans, qui a provoqué sa mort. Le 5 mars 2015, la victime est arrêtée par la brigade anti-criminalité(BAC). Selon le témoin, un agent de la BAC l’attrape par le cou « en plaçant son bras contre son cou et en le plaçant contre son torse. Il s’est abaissé dans les bras des policiers et a commencé à suffoquer, l’agent de la BAC l’a entrainé dans sa chute en continuant à l’étrangler ». Il est ensuite plaqué au sol. « Il se débattait et donnait l’impression d’avoir peur de mourir. À ce moment-là, on sentait qu’il n’arrivait pas à reprendre son souffle : il émettait des cris d’agonie et d’étouffement ». L’homme est décédé dans la nuit des suites de ses blessures, le procureur a prononcé un non-lieu en novembre 2015.
Jean-Paul, 15 ans, à Saint-Ouen : « Un plus grand, de 17 ou 18 ans, a commencé à faire le malin, à dire "vous n'avez pas le droit de venir comme ça nous contrôler, on est dans notre cité, on est chez nous". Les policiers l'ont pris dans une camionnette, ils l'ont frappé et relâché ».
Hakim, 16 ans, à Sainte-Geneviève-des-Bois : « Ils ont dit "la prochaine fois, on ne vous contrôle même pas. On bloque la porte avec un bâton, on met 3 mains par le trou et 3 gazeuses, et on vous laisse 1h à l'intérieur pour que vous voyez l'effet que ça fait". Et ils rigolaient ».
Sami, 18 ans, à Strasbourg : « Ils voulaient faire une palpation mais mon pantalon était trop épais. J'ai dit que je n'étais pas connu des services et leur ai proposé d'appeler pour vérifier, mais ils ont refusé. Je leur ai proposé d'aller au poste pour que je retire mon pantalon.Y en a un qui m'a baissé mon pantalon dans la rue. Ils m'ont rendu mes papiers. Ils ne m’ont pas touché quand j'étais en caleçon. Ils sont partis ».
Fatima, sœur de la victime Karim, à Romainville : « Il lui mettait la main sur la bouche et lui pinçait le nez, et il lui a dit "est-ce que tu vois du sable et des chameaux ici ? on n'est pas chez toi ici ! ».
L’augmentation des libertés données aux agents des forces de l’ordre pour la lutte anti-terroriste inquiète au plus haut point …
Lina Badreddine