Face à Fillon le catholique, Le Pen peut-elle rallier une partie de l’électorat musulman ?

 Face à Fillon le catholique, Le Pen peut-elle rallier une partie de l’électorat musulman ?

À la Réunion


Impensable il y a seulement quelques semaines, l’écrasante victoire de François Fillon change la donne pour le Front national. En déplacement à La Réunion, Marine Le Pen a déclaré dimanche avoir « toujours pensé » que François Fillon « serait un très bon candidat » face à elle au second tour de la présidentielle. Face au champion de la droite qui revendique son catholicisme, la patronne de l’extrême droite française a notamment affirmé que la construction de mosquées ne lui posait « aucun problème ».


La phrase lâchée dans ce petit bout de France de l’Océan Indien prend à contre-pied les discours des cadres du FN, qui ont toujours manifesté leur hostilité face à la pratique de l’islam. Dans les villes contrôlées par le parti d’extrême droite et ses alliées, les mairies se sont systématiquement opposées à l’ouverture de nouvelles mosquées. En changeant de ton, l’eurodéputée pourrait ainsi éviter de se couper de l’électorat musulman que le catholicisme de l’ancien premier ministre pourrait effrayer en cas de duel au second tour de la présidentielle.


Stratégiquement, Marine Le Pen vise à élargir son audience, déjà développée dans les milieux populaires, grâce à ses prises de position protectionnistes et ses promesses plus sociales que celles de son père. À la supposée « soumission aux exigences ultralibérales de l'Union européenne » de François Fillon, Marine Le Pen a choisi d’opposer « le patriotisme économique, la priorité nationale, la protection de nos entreprises face à la concurrence internationale déloyale ». Si la droite veut séduire les riches, l’extrême droite tente donc de rallier davantage les classes populaires en pointant « le pire programme de casse sociale qui n'ait jamais existé » et en accusant son rival de vouloir « la suppression de la Sécurité sociale, la suppression de la durée légale du travail, la dérégulation totale ».


Or, les musulmans sont largement représentés dans l’électorat populaire et pourraient donc former un réservoir de voix le moment venu. Pour ne pas se brouiller avec ses électeurs traditionnels, Marine tente la nuance en se disant « contre la construction de mosquées salafistes ». Mais, pour les autres mosquées, « aucun problème », à condition que ce ne soit pas avec l’argent public, conformément à loi.


Rached Cherif