Emploi dans la fonction publique : discrimination des candidats d’origine maghrébine selon un rapport

 Emploi dans la fonction publique : discrimination des candidats d’origine maghrébine selon un rapport

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Les candidats d'origine maghrébine et ceux vivant dans les quartiers défavorisés sont pénalisés dans l'accès aux fonctions publiques hospitalière et territoriale. Ce sont les conclusions du rapport commandé par premier ministre à Yannick L'Horty, enseignant-chercheur à l'Université Paris-Est Marne-la-Vallée, le premier à s'intéresser à discrimination dans le recrutement de la fonction publique (État, hospitalière, territoriale).


 


« Une exigence d’exemplarité s’impose aux employeurs publics »


« En créant un décalage incompréhensible entre la promesse républicaine d’égalité, de méritocratie, et la réalité, ces pratiques ébranlent ce qui fonde notre cohésion nationale », a réagi Manuel Valls dans un communiqué. Pour lui, « une exigence d’exemplarité s’impose aux employeurs publics ». « Ce type d’enquête sera désormais rendu public chaque année », a assuré de son côté la ministre de la Fonction publique Annick Girardin. « C'est indispensable pour sensibiliser et comparer les progrès réalisés », a-t-elle dit dans un communiqué.


L'État ne peut « pas donner d'injonctions aux entreprises si lui-même n'(est) pas exemplaire », a réagi Dominique Sopo, président de SOS Racisme, en qualifiant ce rapport de « bienvenu », dans un communiqué.


 


Discrimination plus manifeste dans la fonction publique territoriale et hospitalière


M. L'Horty s'est appuyé sur l'exploitation systématique de bases de données de concours externes de la fonction publique d'État, et des campagnes de tests de discrimination dans l'accès à l'emploi public et à l'information sur les offres d'emploi. À ces données s'ajoutent des entretiens auprès de recruteurs.


Concernant l'accès à l'emploi, les tests ont porté sur l'envoi de 3 258 candidatures virtuelles en réponse à 1 086 offres d'emploi réelles concernant cinq professions de la fonction publique : policier national, infirmier en soins généraux, responsable administratif, technicien de maintenance et aide-soignante. Ils montrent que les candidats d'origine maghrébine sont pénalisés dans les fonctions publiques hospitalière et territoriale, et qu'il en va de même pour les candidats résidant dans des quartiers défavorisés. En revanche, les tests ne révèlent pas de différence de traitement dans la fonction publique d'État, où des actions en faveur de l'égalité ont été déployées depuis dix ans (label diversité, parité et pluralité des jurys et commissions de recrutement notamment).


S'agissant des concours, les femmes, les personnes nées hors de France métropolitaine ou encore celles résidant dans les quartiers défavorisés ont moins de chance de les réussir, selon les données d'un panel de 400 000 candidats à 90 concours relevant de cinq ministères (Affaires étrangères, Intérieur, Travail, Éducation nationale et Recherche). Les chercheurs ont aussi testé « l'accès à l'information » via des demandes sur les opportunités d'emploi adressées à des commissariats et des hôpitaux. Ces tests ont mis en évidence une discrimination dans les hôpitaux publics « entre une femme candidate française et une autre signalant une origine maghrébine par son patronyme ». Ils n'ont en revanche pas révélé de différence de traitement dans la police nationale.


 


Vers des rapports périodiques


M. L'Horty n'avait pas pour mission d'émettre des recommandations, qui feront l'objet d'une mission complémentaire. Il suggère cependant la mise en place d'un « outil de suivi de l'égalité d'accès à l'emploi » dans les domaines tels que la parité, la diversité, l'origine sociale, le lieu de résidence et l'âge, faisant l'objet d'un « rapport annuel chiffré ».


Le ministère de la Fonction publique a souligné que le projet de loi égalité et citoyenneté, adopté en première lecture à l'Assemblée, prévoit « un rapport bisannuel sur la lutte contre les discriminations et une collecte des données des candidats aux concours par les services statistiques des administrations ».


L'emploi public représente près d'un cinquième de l'emploi total en France. On dénombrait 5,6 millions d'agents publics fin 2014 : 2,5 millions dans la fonction publique d'État (44 %), deux millions dans la territoriale (35 %) et 1,2 dans l'hospitalière (21 %).


Rached Cherif


(Avec AFP)