Élections législatives : Farida Amrani VS Manuel Valls
Les nuits de Manuel Valls ne doivent pas être des plus paisibles en ce moment. Il sait que le 18 juin prochain, il pourrait perdre son mandat de député, de surcroît face à une citoyenne Farida Amrani qui se présente sous les couleurs de la France insoumise. Elle, 40 ans, maman de trois filles, fonctionnaire dans une collectivité territoriale de l’Essonne, militante de terrain depuis de nombreuses années a un parcours à l'exact opposé de celui de l'ancien Premier ministre.
Lui est un homme politique professionnel qui n'a jamais vraiment "travaillé de sa vie", siégeant à l'âge de 25 ans en 1986, au Conseil régional d'Ile-de-France, d'abord comme simple conseiller, puis en qualité de vice président en 1998, avant de devenir maire d'Evry en 2001 à 39 ans, puis député l'année suivante. Le président François Hollande le nommera ministre de l'Intérieur en 2012, puis Premier ministre deux ans plus tard. Etc., etc., etc., etc., etc. …
Malgré son "CV impressionnant", il est aujourd'hui, de loin, l'un des hommes politiques les plus détestés de France. Les derniers sondages le donnent au coude à coude avec Farida Amrani. Sa défaite signerait sans doute la fin d'une carrière politique vieille de 30 ans.
Un parcours fait de nombreux reniements et de trahisons. Comme quand après avoir promis de soutenir le vainqueur de la primaire socialiste à laquelle il avait participé, il appela à voter Emmanuel Macron. On se souviendra aussi de ses propos indignes sur les Roms ou de son obsession à diviser la société française. Son probable échec en satisferait beaucoup.
"Il n'y a pas un jour qui passe où on nous demande de tout faire pour débarrasser Manuel Valls du champ politique", confirme Farida Amrani, qui prévient d'emblée qu'on "ne battra pas l'ancien Premier ministre, juste en étant anti-Valls. Il faut avoir un programme", martèle la jeune femme.
"Le dégoût que beaucoup ressentent vis-à- vis de Manuel Valls signifie beaucoup de choses. Les gens veulent le retour de l'humilité et de la dignité en politique. Ils ne veulent plus de ces retournements de vestes. Dans l'Essonne, Manuel Valls incarne celui qui a concentré tous les pouvoirs", explique Ulysse Rabaté, son suppléant.
"La victoire de Farida aurait une portée symbolique. C'est l'histoire de David contre Goliath, du pot de fer contre le pot de terre mais pas seulement. Farida est une femme, jeune, d'origine maghrébine et issue d'un quartier populaire et dont les compétences sont reconnues : elle rassemble bien plus largement que Manuel Valls et incarne une autre idée de notre société, généreuse et ouverte.", continue Ulysse Rabaté.
Rien ne prédestinait Farida Amrani à entrer en politique. En 2014, à la suite d'une réunion de parents d'élèves où elle dit ne pas avoir été entendu par le maire socialiste d'Evry, Francis Chouat, ce dernier lui conseille alors de monter sa propre liste. Il ne croit pas si bien dire. "Quelques semaines après, nous avons déposé une liste Front de Gauche". Dans ce bastion socialiste, Farida et les siens obligent le maire à un second tour. Avec 20% des voix, ils feront élire quatre élus d’opposition.
"Notre investissement local se fait tous les jours et pas seulement pendant les échéances électorales", raille la militante. "Nous avons démarré la campagne pour les législatives il y a plusieurs mois. Nous avons beaucoup discuté avec les habitants des quartiers populaires de la circonscription et leurs réalités sont aussi les nôtres. Nous avons mené des combats ensemble, avec les gens qui vivent ici : pour le respect des habitants dans le cadre de la rénovation urbaine, pour l'Education Populaire… Contrairement au candidat Valls, nous ne sommes pas déconnectés de la réalité ", rappelle Ulysse Rabaté. "On est à la fois fort du gros score de Jean-Luc Mélenchon à la Présidentielle mais aussi de notre ancrage militant. Du coup, il y a une bonne dynamique et ce n'est donc pas une surprise si on talonne Valls", explique Farida Amrani.
Les deux candidats rappellent que l'ancien Premier ministre est l’un des "principaux responsables du fiasco du quinquennat Hollande". Ils insistent de nouveau sur le fait que parce que "privilégié et donc déconnecté de la réalité", Manuel Valls, s'il est de nouveau élu, ne sera pas en mesure de prendre les "décisions dans l’intérêt du peuple".
Puisse le peuple les entendre…
Nadir Dendoune