Égypte : Entre démocratie et vente d’armes, François Hollande a fait son choix

 Égypte : Entre démocratie et vente d’armes, François Hollande a fait son choix

En assistant à l’inauguration du nouveau canal de Suez


Le président français François Hollande, invité d'honneur de l'Égypte jeudi pour l'inauguration du nouveau Canal de Suez, a résolument placé la lutte contre le terrorisme au coeur de la relation franco-égyptienne, tout en affirmant avoir défendu la vision française des droits humains. Mais contrairement à d’autres pays comme l’Allemagne et les États-Unis, la France s’est gardée de critiquer publiquement la politique répressive du pouvoir égyptien.


 


Priorité à la lutte contre le terrorisme


Son hôte, le président Abdel Fattah al-Sissi, qui a destitué par un coup d’État son prédécesseur l'islamiste Mohamed Morsi, premier président démocratiquement élu d'Égypte, est accusé de « crimes contre l'humanité » par des organisations de défense des droits humains. « Aujourd'hui, les relations entre la France et l'Égypte sont fondées sur des intérêts communs, c'est la lutte contre le terrorisme et pour la sécurité », a martelé le chef de l'État devant la presse, à l'issue d'un entretien bilatéral avec le raïs égyptien.


Sa présence à Ismaïlia, aux côtés du président égyptien qui tient son pays d'une main de fer, a été épinglée par certains médias en France. L'organisation Human Rights Watch a accusé le président Sissi de « tuerie de masse qui s'apparente probablement à un crime contre l'Humanité », après la mort de quelque 1 400 partisans de M. Morsi.


 


Des élections pour quoi faire ?


Mais « cela n'empêche pas qu'il y ait de la franchise entre nous », Français et Égyptiens, s'est défendu M. Hollande. « Nous l'avons toujours dit à travers les processus électoraux que nous souhaitons voir dans un court délai », a-t-il ajouté. Les élections législatives sont d'ailleurs « prévues, ça m'a été confirmé (par M. Sissi), à la fin de l'année », a ajouté M. Hollande.


La précédente élection présidentielle, un an après le coup d’État militaire, a vu Abdel Fattah al-Sissi être élu avec près de 97 % des voix. Un score supérieur à ceux réalisés sous la dictature du président Moubarak.


 


Les marchands de canons ont le sourire


La « coopération va se poursuivre et se renforcer. Il y a déjà eu des livraisons d'une frégate de dernière génération, il y en aura d'autres, parce que nous avons la volonté de faire en sorte que l'Égypte puisse se défendre face au terrorisme », a souligné M. Hollande. L'Égypte est ainsi le premier pays à avoir acheté l'avion de combat français. La frégate et trois des 24 avions commandés ont d'ailleurs participé à la parade militaire jeudi.


« Je suis préoccupé par la situation dans la région : Libye, Syrie, Irak, Yémen, et les actes terroristes ici même en Égypte, notamment dans le Sinaï », a affirmé le président français. « Face à cette menace, nous devons trouver des partenaires, que ces partenaires puissent à la fois avoir les moyens de se défendre contre le terrorisme (…). Telle est le sens de ma présence ici », a martelé M. Hollande. L'émir du Koweït, les présidents yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi et soudanais Omar el-Béchir – qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt international émis par la CPI – étaient notamment présents.


 


Fin du printemps égyptien


Plus de 15 000 partisans de l'ex-président Morsi, essentiellement des membres de sa confrérie des Frères musulmans, ont été emprisonnés et des centaines condamnés sont morts dans des procès de masse expéditifs qualifiés par l'ONU de « sans précédent dans l'histoire récente » du monde. La répression, d'abord limitée à l'opposition islamiste, s'est ensuite élargie aux mouvements laïcs et de gauche, fers de lance de la révolte de 2011.


« On essaie de leur dire que s’ils ont les mains trop lourdes, ils vont radicaliser la population. C’est un constat très difficile à faire entendre en Égypte », a cependant confié un diplomate français au journal Le Monde.


Rached Cherif