FMI : La Tunisie doit contenir la masse salariale à 15% du PIB en 2022
Avant son départ vers Washington pour une mission de lobbying auprès du FMI dite de la dernière chance, une délégation gouvernementale tunisienne a fait l’objet de critiques autour de l’opacité des promesses auxquelles elle s’engage en contrepartie d’un nouveau prêt.
Mais nous en savons davantage aujourd’hui sur le contenu de la feuille de route rédigée côté tunisien. Ainsi les autorités tunisiennes s’engagent, dans le cadre d’un plan de réformes présenté au FMI, à mettre en œuvre un ensemble de mesures qui, en plus du gel des augmentations de salaires en 2021, devraient permettre de contenir la masse salariale autour de 15% du PIB en 2022, contre 17,4% en 2020.
Avant la révolution, en 2010, l’Etat employait 404 000 salariés dans la fonction publique. Selon les dernières statistiques en date, ce chiffre aurait quasiment doublé aujourd’hui : la fonction publique employait 785 326 personnes en 2018, soit près de 7% de la population.
C’est pourquoi la réforme de la masse salariale est l’une des composantes essentielles de ce plan présenté par la délégation gouvernementale tunisienne au bailleur de fonds international, lors de sa visite de 5 jours en cours aux Etats-Unis, du 3 au 8 mai 2021.
De son propre aveu, le gouvernement Mechichi y affirme qu’« en l’absence de réformes profondes et innovantes, la trajectoire tendancielle de la masse salariale sera préjudiciable aux équilibres budgétaires ».
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Fin 2019, le FMI avait déjà suspendu le versement de deux tranches à l’Etat tunisien, celui-ci n’ayant pas honoré ses engagements en matière de grandes réformes économiques. La Tunisie doit rembourser quelque 4,5 milliards d’euros sur l’année en cours et a ainsi besoin d’une rallonge de 5,7 milliards d’euros pour boucler son budget 2021, sur fond de crise socio-politique aggravée par la pandémie.
Programme de départs volontaires
A l’image de ce qui se fait notamment dans nombre de pays industrialisés, les autorités proposent quelques axes de réforme visant l’allègement de la masse salariale, dont essentiellement la mise en place d’un programme de départs volontaires permettant aux fonctionnaires de conserver 25% des salaires nets, en sus des cotisations sociales, pour se consacrer à une autre occupation y compris une activité rémunérée, autre que dans le secteur public et les entreprises publiques.
Le gouvernement envisage également d’adopter un nouveau programme de départs anticipés à la retraite avec une prise en charge par l’Etat du différentiel de pension, payé à l’âge légal de la retraite. Il est question par ailleurs d’une incitation au travail partiel de 50% du temps du travail à une journée par semaine, contre une partie équivalente du salaire. « Ces mesures favoriseront la baisse des effectifs et auront un impact immédiat sur la masse salariale sans remise en cause des droits et des avantages des fonctionnaires », estiment les autorités.
S’agissant des réformes structurelles, l’Etat prévoit aussi l’encouragement à l’entrepreneuriat en octroyant aux fonctionnaires la possibilité de bénéficier d’un « congé pour création d’entreprise » d’une durée de 5 ans, renouvelable via un système déclaratif. Flexible, ce système permettra la possibilité de réintégrer la fonction publique, conditionnée à l’envoi d’une notification d’au moins 6 mois avant la date du retour.
En 2020, le PIB tunisien a reculé de -8,9%, après avoir augmenté de 1% en 2019. « Le PIB réel de la Tunisie devrait rebondir et augmenter à 2%, en 2021, puis à 3,9% en 2022 », prévoit la Banque africaine de développement BAD, mais à condition que la pandémie de Covid-19 se tasse et permette une reprise de l’économie mondiale et européenne.
Lourdement endettée, la Tunisie se tourne vers le Fonds monétaire international pour la quatrième fois en une décennie, espérant cette fois un accord sur trois ans et l’obtention de 3,3 milliards d’euros pour 2021.