Fethi Zouhair Nouri, nouveau gouverneur de la Banque centrale de Tunisie
Le mandat de Marouane Abassi touchant à sa fin au bout de six années de service, la Banque Centrale de Tunisie (BCT) a depuis le 15 février 2024 un nouveau gouverneur en la personne de Fethi Zouhair Nouri (69 ans), qui est-il ? Portrait.
L’avènement de Nouri annonce-t-il une nouvelle ère pour la BCT et plus généralement pour la politique monétaire du pays ? Pour le comprendre, il faut brièvement revenir sur ce qui a caractérisé le mandat de son prédécesseur Abassi. Nommé en février 2018, ce dernier laissera un héritage fait d’une certaine orthodoxie financière en matière de protectionnisme du dinar tunisien, bien que pressé dès son entrée en fonction par le pouvoir, incarné à l’époque par le chef du gouvernement Youssef Chahed, d’opérer une « correction » du cours du dinar sous la contrainte des consignes du FMI. En réalité une politique de dévaluation (voulue) qui ne dit pas son nom, bien que parfois qualifiée de dépréciation (subie).
Mais Marouane Abassi gardera sans doute un goût amer de sa fin de mandat où tout s’est accéléré à partir du coup de force constitutionnel de juillet 2021, où un Kais Saïed devenu chef d’Etat détenteur des pleins pouvoirs a progressivement rejeté l’idée de tout contre-pouvoir qui lui échappe, y compris la souveraine Banque centrale dont il ne conçoit pas la notion d’indépendance. Une logique de mise sous tutelle qui a culminé avec l’irruption du président Saïed dans le siège de la banque en septembre 2023, un coup de com’ symboliquement humiliant pour Abassi. L’Histoire retiendra ainsi que c’est sous le mandat certes finissant de Marouane Abassi que la BCT a partiellement perdu son indépendance, contrainte par une loi saïdiste de prêter 7 milliards à l’Etat avec 0 intérêt.
Un technocrate spécialiste des ressources énergétiques
Le nouveau gouverneur Fethi Nouri peut se prévaloir d’une carrière s’étendant sur plusieurs décennies dans le domaine économique et financier. Né le 7 novembre 1955, il devient Professeur de l’enseignement universitaire en Micro & Macro Economie, « Politique économique et Grands Problèmes contemporains et marché de l’énergie » en 1990.
Nouri a obtenu en 1987 son doctorat en sciences économiques à Paris 2 à l’Institut Français de Pétrole (analyse des contrats pétroliers). Le nouveau gouverneur de la BCT a par ailleurs plusieurs mastères à son actif, en Economie de l’Energie, Economie Industrielle et Finance Internationale et Planification.
Il est déjà en outre depuis juin 2016 membre du Conseil d’administration de la Banque centrale de Tunisie, où il a contribué pendant plus de sept années à orienter les politiques monétaires du pays. Sa contribution active au sein de l’institution a sans doute joué un rôle dans sa désignation qui constitue un choix de la continuité sans grande prise de risque.
Fethi Zouhair Nouri est également professeur des universités à la Faculté des sciences économiques et de gestion de Tunis et à l’ESSECT. Mais sa spécialisation dans les questions énergétiques constitue un élément de son CV qui a sans doute joué en sa faveur pour ne pas que Kais Saïed oppose son veto, au moment où l’actuel pouvoir souverainiste lorgne sur la nationalisation d’un certain nombre de forages pétroliers.
