Fabrizio Delage Paganini transforme en or les données agricoles

 Fabrizio Delage Paganini transforme en or les données agricoles

Fabrizio Delage Paganini, cofondateur de Valeur Tech (Archives personnelles de Fabrizio Delage)

Ce trentenaire franco-italien, spécialiste de gestion hydrique et d’I.O.T (Internet Of Things, Internet des objets) a cofondé Valeur-Tech, qui analyse les big data agricoles. Fabrizio Delage Paganini s’est installé à Casablanca pour viser le marché intérieur marocain avec l’Afrique en ligne de mire.

A première vue, Fabrizio passe pour le « parigot ». Langage soutenu, débit mitraillette et téléphone toujours à portée de main. Et pourtant, il a le « pied » agricole par son père, qui l’initie à la ferme d’élevage et à la valorisation du patrimoine régional limousin. Par sa mère,  il est impliqué avec ses cousins maternels aux travaux viticoles dans la Vénitie. Après des études à Dauphine et Les Mines, Fabrizio Delage effectue une première expérience chez le géant mondial des métiers de l’eau, Suez Environnement.

Une autre expérience chez Sigfox, acteur des réseaux bas débit, où il est en charge de développer la smart agriculture, va pousser le franco-italien à prendre goût à la gestion de la ressource hydrique. «Les objets connectés peuvent aider pour l’environnement, nous indique Fabrizio Delage. J’expliquais, aux communes, les compteurs d’eau intelligents qui permettent de mieux gérer les fuites dans les villes et dans les campagnes. J’ai pris conscience que l’eau était une ressource rare et qu’on la  gaspille un peu trop facilement. »

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« La valeur de demain, c’est les données »

En juillet 2017, avec un capital de 4000 euros, il crée avec son associé, ancien conseiller à la FAO, Pierre Poullain, l’entreprise Valeur-Tech.

Ce cabinet de conseils agricoles propose aussi une solution de gestion et d’analyse des big data agricoles. « Les agriculteurs étaient défiants vis à vis de la technologie et pourtant tous les acteurs du monde agricole (agriculteurs, négoce, ministère) avaient une problématique commune, à savoir l’utilisation des données récoltées, leur valorisation, leur sécurité et leur monétisation. La valeur de demain, c’est la denrée alimentaire mais aussi les données. »

Le chiffre d’affaires en moins de deux ans atteint la centaine de milliers d’euros. Il sert à financer la plateforme de gestion de données agricoles. Une plateforme qui relève eau, fertilisation, climat, rendement, conditions météo, qualité du sol, protection des champs, génome des plantes, etc. « Elles doivent être valorisés pour l’agriculteur mais aussi pour le consommateur. Demain, le consommateur va pouvoir savoir ce qu’il mange. Il pourra consulter le temps de pâturage de l’animal ou les résidus de pesticides dans les aliments. »

Et le nerf de la guerre est bien là : la valeur des big data agricoles. D’un coté, on assiste à une hausse constante de la demande alimentaire. On parle même de doublement de la production actuelle en 2025. De l’autre, les agriculteurs doivent baisser leurs ressources en eau et en produits chimiques tout en optimisant leurs récoltes. L’accès à des informations en avance pour contrôler les marchés à terme des prix des matières premières, a aussi une influence sur la sécurité alimentaire des pays. «Il est important d’être garant de la souveraineté alimentaire par la souveraineté numérique. Avec notre solution, l’agriculteur peut choisir avec qui il veut partager ses données et sa valeur ajoutée.»

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Un développement au Maroc après l’Ukraine

Après une 1ere expérience réussie en Ukraine, Valeur-Tech se développe au Maroc depuis Casablanca. Son lien d’abord familial avec le Maroc, se renforce. « Le Royaume est une vitrine avec son plan Maroc Vert. Le pays est un terrain fertile pour tester des technologies agricoles. On pourra conserver de la donnée.»

Ces datas seront aussi l’occasion pour le Maroc de rentrer dans « le moule » des certifications européennes pour les produits d’exports. « On est à la veille d’une traçabilité alimentaire entre l’Europe et le continent africain. Le Maroc peut jouer un rôle pivot pour le recensement de la donnée agricole. »