Expulsions record de migrants tunisiens : une affaire d’Etat

 Expulsions record de migrants tunisiens : une affaire d’Etat

Après la France, qui avait félicité la Tunisie dès novembre dernier pour avoir le mieux collaboré dans l’expulsion de ses propres ressortissants, les chiffres officiels des expulsions de migrants tunisiens depuis l’Italie viennent de tomber pour l’ensemble de l’année 2021 : les Tunisiens sont très loin devant les autres nationalités d’Afrique du nord, sous l’effet d’accords tacites toujours en vigueur.

Ainsi selon les statistiques du ministère de l’Intérieur italien s’agissant des expulsions par voie aérienne de migrants non réguliers, pas moins de 1872 Tunisiens ont été expulsés en 2021, contre uniquement 2 algériens, 12 marocains, et 231 Egyptiens. Des chiffres sans appel, qui suggèrent que comme pour la France, les accords opaques entre les autorités actuelles en Tunisie et leurs homologues en Italie, tournent à plein régime, discrètement, via des aéroports annexes dont celui d’Enfidha – Hammamet.

>> Lire aussi :  Un « accord tacite » d’expulsion des migrants tunisiens en France ?

En pointe sur ce cette embarrassante polémique, le député tunisien Majdi Karbai (élu Attayar représentant les Tunisiens de l’étranger pour la circonscription de l’Italie) déplore l’attitude profondément humiliante du gouvernement tunisien dans ce dossier qu’il continue de suivre de très près.

53 vols commerciaux ont été réquisitionnés pour des rapatriements forcés vers la Tunisie en 2021, selon un document consultable ici

Les résidents Tunisiens dont le statut légal a expiré, également concernés

« Comme on peut le constater, la Tunisie se détache du lot en matière de taux d’expulsions cette année. Ceci est le résultat d’un accord inique. Les opérations de reconduite ne concernent pas uniquement les « harragas » arrivés dans des embarcations de fortune, mais aussi les migrants résidents permanents qui ont perdu leur statut légal en Italie et des détenteurs de visas et de titres de séjour ayant expiré », précise le député, contacté par le Courrier de l’Atlas.

Sur les réseaux sociaux les hashtags « non aux expulsions inhumaines » et « la Tunisie n’est pas le gendarme de l’Europe » sont récemment apparus.

Pour certains observateurs de la scène politique internationale, le régime autoritaire qui tente de se mettre en place en Tunisie veut ainsi acheter la bienveillance des européens, ayant bien compris que le prisme dominant par lequel l’Union européenne voit les récents développements en Tunisie reste le risque migratoire pour ses frontières.

« Des accords existent entre l’Italie et la Tunisie depuis la fin des années 90, mais ont été profondément revus en novembre 2020, après la visite de Luigi Di Maio à Carthage. Les autres pays du Maghreb n’acceptent manifestement pas que leurs ressortissants soient ainsi traités. Les autorités tunisiennes ont en réalité accepté ce deal pour une contrepartie financière dérisoire de quelques millions d’euros d’aides, ainsi que la révision des restrictions de visas », s’indigne Karbai.