Papa est mort

 Papa est mort

crédit photo : Brigitte Baudesson


Livre personnel et très intime, “Nos 14 novembre”, c’est le témoignage bouleversant d’Aurélie Silvestre, 37 ans, qui a perdu son mari sous les balles des terroristes, au Bataclan, le 13 novembre 2015. 


Quand la jeune maman a dû annoncer la mort de son père à Gary, 3 ans, elle n’a pas cherché à trouver des formules ou des façons d’annoncer la nouvelle. Elle a simplement dit : “Papa est mort”. Gary a tout de suite compris, s’est effondré et pleuré.


Aurélie explique qu’elle a décidé d’écrire pour elle, dans un premier temps. Une façon de tout garder car plus le temps avance, plus les souvenirs s’estompent. Mais ce qu’elle voulait avant tout, c’est que ses enfants sachent combien leurs parents s’étaient aimés. Après le choc, le quotidien a repris le dessus. Aurélie a dû réapprendre à vivre et surtout à vivre seule, sans son mari, avec désormais deux enfants. On découvre dans son livre une jeune maman à la force de caractère inouïe. Une sacrée leçon de survie.


 


Une petite fille née en mars 2016


Il lui fallait mettre sur le papier une histoire dramatique mais qu’elle a décidé de raconter tout de même. Enceinte au moment du drame, cette femme de 37 ans a perdu son compagnon Matthieu, parti un 13 novembre assister à un concert… au Bataclan. Un maître de conférences de 38 ans en géographie, avec lequel elle a partagé plus de dix ans de sa vie, et dont elle attendait un deuxième enfant, Thelma née le 16 mars 2016. D’ailleurs, comme elle le souligne, Matthieu n’allait pas souvent voir des concerts mais là c’était du rock, du vrai !


Son ouvrage coule naturellement. Un texte personnel d’une grande puissance, sans qu’on puisse déceler une once de colère. Plus qu’un récit personnel, c’est une lettre adressée à Matthieu : “Je mesure la chance d’avoir été aimée par un homme comme lui et qu’il parte sans aucune ombre entre nous.”


Pour éviter de tomber dans l’obsession de savoir pourquoi et comment son amoureux est tombé sous les balles des terroristes, Aurélie Silvestre n’a pas cherché à recueillir des témoignages sur ce qui s’est passé ce soir-là dans la salle de concert parisienne. “J’ai su très vite que Matthieu était mort sur le coup, probablement au début de l’attaque.”


 


La folie du monde en pleine gueule


En mars 2016, Aurélie a donné naissance à sa petite dernière Thelma. Une nouvelle étape. “A partir du moment où sa sœur est arrivée, Gary a cessé de se réveiller la nuit. Il n’y a aucune jalousie entre eux, c’est un bonheur. Bon, quand je demande à Gary de ranger ses jouets, il ne les range pas, hein, comme un enfant lambda”, rigole la jeune maman dont l’humour ne s’est pas éteint ce soir du 13 novembre. Cette épreuve l’a-t-elle changée ? “J’ai le sentiment d’être la même, mais, oui, ça transforme. Je suis une fille normale, fonceuse quand il faut, et je me suis pris en pleine gueule la folie du monde. Ça secoue. Désormais, je dois élever seule mes deux enfants.” Une leçon de courage et de ténacité contre l’adversité. 



Nos 14 Novembre, Aurélie Silvestre, JC Lattès, 120 p., 15€


MAGAZINE SEPTEMBRE 2017