« En mode avion » : reconnexion avec la nature et soi-même
Environnement, introspection, spiritualité, autant de thèmes forts développés, au fil d’une marche le long des méandres du GR10 (Pyrénées), dans le documentaire « En mode avion ».
« En mode avion », une histoire de résilience et d’opportunité. Résilience pour le personnage principal du documentaire « En mode avion ». En 2014, Samir Oueldi, informaticien originaire de Montataire dans l’Oise, se lance le défi de faire la traversée des Pyrénées sur le GR10. Faute de préparation suffisante, c’est un échec. En 2020, il se prépare sérieusement et tente de nouveau la traversée.
Opportunité pour le réalisateur Mehdi Ouldsaad de filmer cette aventure personnelle. Opportunité également d’apporter un message fort pour la préservation de l’environnement et une réflexion sur nos modes de vie. Mais résilience pour le réalisateur aussi, puisque le film doit encore être finalisé. Mehdi Ouldsaad revient avec nous sur le documentaire.
LCDL : Comment avez-vous rencontré Samir Oueldi ?
Mehdi Ouldsaad : Nous nous sommes rencontrés autour de notre engagement dans l’humanitaire. D’abord comme collègues dans plusieurs associations, où il s’occupait du développement informatique et où j’étais chargé de la communication vidéo. Nous accrochons tout de suite car nous partageons la même vision, les mêmes références et le même goût pour les projets impactants et disruptifs.
Puis, Samir devient directeur d’une ONG internationale : Ummah Charity. Il me confie en tant que prestataire la réalisation de films de sensibilisation, notamment #Autism en 2018. Le film a un fort impact et permet de contribuer à la médiatisation de la cause autistique. On est régulièrement en contact et on essaie de monter des projets ensemble dès que l’occasion se présente.
Les préparatifs pour aller filmer dans les Pyrénées semblent avoir été faits dans l’urgence. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Le film n’était clairement pas prévu. Samir s’est lancé dans cette aventure folle : traverser les Pyrénées à pied sur un sentier de randonnée mythique : le GR10. Au fil de son aventure qu’il partage sur les réseaux sociaux, on découvre avec Wissame (le producteur du film) que son quotidien est riche en enseignements et en rencontres.
L’idée du film commence alors à germer, mais il faut se décider rapidement… Chaque jour qui passe, Samir s’approche alors un peu plus de la ligne d’arrivée. Nous avons donc fait nos sacs à dos : direction les Pyrénées avec l’espoir de revenir avec un film. Il y avait une vraie prise de risque, car nous n’avions aucune garantie du résultat. Le manque de préparation aurait pu nous coûter cher en revenant certes bredouilles, mais surtout sur le plan physique en risquant de nous blesser.
La présentation du documentaire parle d’une remise en cause du mode de vie citadin. Qu’entendez-vous par là ?
Nous vivons dans une société ultra connectée, où tout va toujours plus vite et où nous sommes constamment exposés au bruit. Le bruit au sens large : sons, notification, pollution, etc. Les statistiques sur le stress en France sont en hausse depuis des années. Nous n’arrivons plus à prendre le temps de contempler le monde qui nous entoure, la nature et la beauté de la création. Et lorsque nous prenons parfois ce temps, notre esprit est souvent ailleurs et ne profite pas de l’instant présent.
Dans les montagnes, c’est le calme. Les préoccupations se limitent à : « Où vais-je poser ma tente ce soir » et à « Qu’est-ce que je vais manger ? ». Du coup, ça permet de relativiser les événements de notre quotidien et de prendre conscience que l’être humain est capable de vivre, et d’être heureux avec le minimum vital. Le but n’est pas de vivre une vie monacale, c’est pour ça que le film s’appelle « En Mode Avion » et non pas « Déconnexion ». C’est l’idée de se couper temporairement de la civilisation pour revenir rechargé et avec des idées nouvelles.
Cette marche dans les Pyrénées a permis à S. Oueldi de faire une introspection. Quelle place prend la spiritualité dans ce cheminement du marcheur et dans le documentaire ?
Cette quête initiatique, c’est le point de départ de l’aventure de Samir. Lorsqu’il décide de partir en juin dernier, il espère pouvoir faire le point sur sa vie, se remettre en question et revenir changé. Comment ? Il l’ignore au départ, mais il décide de partir l’esprit ouvert et surtout avec un cœur réceptif. En tant que croyant pratiquant, il connaît l’importance de ce travail d’introspection pour devenir meilleur et se rapprocher du Créateur.
Cela passe parfois par de grands questionnements, mais très souvent par des choses très simples comme la contemplation de la création. Les montagnes majestueuses, les bienfaits de l’eau et de la nature en général ne peuvent que forcer la réflexion.
Plus généralement, la plupart des marcheurs que nous avons rencontrés lors du tournage étaient également dans cette recherche. Pas forcément tous dans la quête du divin, mais très souvent à la recherche de soi et du changement.
Introspection mais également ouverture à l’autre avec la rencontre de Didier. En quoi cette rencontre est-elle devenue un élément majeur du documentaire ?
Dès le départ nous espérions des rencontres. Elles n’étaient pas prévisibles, car très souvent les marcheurs sont seuls pendant plusieurs jours. Et lorsqu’ils se rencontrent, ils font un petit bout de chemin ensemble, mais les routes se séparent rapidement.
La rencontre de Didier arrive à la fin de l’aventure, à un moment où les deux sont au cœur de leur remise en question et de leur cheminement. Il y a également la peur du retour, mêlée à la fébrilité de retrouver les proches. C’est le climat idéal pour un partage sincère et des échanges forts. Les langues se délient plus facilement et les deux racontent leurs vies comme s’ils se connaissaient depuis toujours. Pourtant dans leurs quotidiens, leurs routes ne se seraient sans doute pas croisées. C’est dans l’adversité et dans cette quête commune qu’ils sont devenus frères de route.
Cette traversée des Pyrénées a permis au marcheur, mais aussi à vous, de redécouvrir la nature. Ce documentaire porte-t-il un message pour la préservation de l’environnement ?
La thématique environnementale est en effet forte dans le film, mais nous ne voulions surtout pas de discours moralisateurs et culpabilisants pour le spectateur. Personnellement, je ne suis pas convaincu d’une telle approche si ce n’est pour prêcher un public acquis à la cause. Le message de préservation de l’environnement est véhiculé de façon implicite par la mise en valeur des paysages et des ressources naturelles. Les plans aériens cinématographiques subliment la beauté de notre pays et doivent nous donner envie de faire de notre mieux pour la protéger.
Il y a aussi un message plus direct lors de nos conversations avec Samir. On suit sa réflexion et sa vision de l’environnement au rythme de son cheminement. Le discours n’est pas conventionnel, c’est plutôt un partage de son ressenti et de son émotion. Au cours de sa traversée, Samir a par exemple pris conscience de la problématique des déchets de façon plus forte, parce qu’il y a été directement confronté. Comprendre les enjeux environnementaux avec des mots simples et des mises en situations concrètes font partie des points principaux du film.
Le film se veut également écoresponsable via le partenariat avec Reforest’Action. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Lors de cette aventure, nous avons pris encore plus conscience de l’importance de préserver notre environnement. Nous avons surtout compris qu’il n’y avait pas de petits gestes pour faire la différence à notre échelle. Comme il nous fallait des fonds pour finir notre film, nous avons lancé courant novembre une campagne de crowdfunding sur la plateforme Ulule. Pour nous soutenir et permettre à notre film d’exister vous pouvez encore contribuer sur ModeAvionFilm.com avant le 19 décembre 2020.
Nous nous sommes associés à Reforest’Action pour qu’à partir d’un certain montant de contributions pour notre film, on peut recevoir en retour un accès au documentaire en avant-première, des goodies et aussi planter un ou plusieurs arbres. C’est une contrepartie utile et qui fait totalement sens avec la thématique du film.
À ce jour, grâce à nos contributeurs nous avons en prévision plus de 50 arbres à planter. En fonction de l’issue de la campagne de crowdfunding, nous espérons aller pourquoi pas jusqu’à 100 arbres à planter.